rement un bénéfice à Rome, ce qui s’appelle une simonie ; on lui demandait s’il croyait que Simon Pierre eût été au pays ; il répondit : « Je ne vois pas que Pierre y ait été, mais je suis sûr de Simon[1]. »
Quant à la personne de saint Pierre, il faut avouer que Paul n’est pas le seul qui ait été scandalisé de sa conduite ; on lui a souvent résisté en face, à lui et à ses successeurs. Saint Paul lui reprochait aigrement de manger des viandes défendues, c’est-à-dire du porc, du boudin, du lièvre, des anguilles, de l’ixion, et du griffon ; Pierre se défendait en disant qu’il avait vu le ciel ouvert vers la sixième heure, et une grande nappe qui descendait des quatre coins du ciel, laquelle était toute remplie d’anguilles, de quadrupèdes et d’oiseaux, et que la voix d’un ange avait crié : « Tuez et mangez. » C’est apparemment cette même voix qui a crié à tant de pontifes : « Tuez tout, et mangez la substance du peuple, » dit Wollaston ; mais ce reproche est beaucoup trop fort.
Casaubon ne peut approuver la manière dont Pierre traita Anania et Saphira sa femme. De quel droit, dit Casaubon, un Juif esclave des Romains ordonnait-il ou souffrait-il que tous ceux qui croiraient en Jésus vendissent leurs héritages et en apportassent le prix à ses pieds ? Si quelque anabaptiste à Londres faisait apporter à ses pieds tout l’argent de ses frères, ne serait-il pas arrêté comme un séducteur séditieux, comme un larron, qu’on ne manquerait pas d’envoyer à Tyburn ? N’est-il pas horrible de faire mourir Anania, parce qu’ayant vendu son fonds et en ayant donné l’argent à Pierre il avait retenu pour lui et pour sa femme quelques écus pour subvenir à leurs nécessités, sans le dire ? À peine Anania est-il mort que sa femme arrive. Pierre, au lieu de l’avertir charitablement qu’il vient de faire mourir son mari d’apoplexie pour avoir gardé quelques oboles, et de lui dire de bien prendre garde à elle, la fait tomber dans le piége. Il lui demande si son mari a donné tout son argent aux saints. La bonne femme répond oui, et elle meurt sur-le-champ. Cela est dur.
Conringius demande pourquoi Pierre, qui tuait ainsi ceux qui lui avaient fait l’aumône, n’allait pas tuer plutôt tous les docteurs qui avaient fait mourir Jésus-Christ, et qui le firent fouetter lui-même plus d’une fois. Ô Pierre, dit Conringius, vous
- ↑ C’est ce que dit Owen, livre V, épigramme viii :
An Petrus fuerit Romaæ, sub judice lis est :
Simonem vero nemo fuisse negat.