de la force centripète et de la force centrifuge ; mais, chose étrange, il ne s’est pas formé jusqu’à présent au-delà des Alpes de véritable parti conservateur en opposition avec un parti du progrès. Ce fait, très digne d’attention, demande quelques explications.
En Italie, tous les bons patriotes ont été révolutionnaires. La raison en est simple : ce n’est que par la révolution qu’ils pouvaient atteindre leur but si ardemment poursuivi, la constitution d’une Italie libre, unie, forte, délivrée du joug de l’étranger. Ce n’est évidemment point par des moyens légaux que l’on pouvait espérer chasser l’Autriche et se débarrasser des despotes qui s’appuyaient sur elle. Les plus éminens parmi les ministres, les députés, les écrivains, ont été autrefois proscrits, exilés, emprisonnés, pour leurs opinions contraires à l’ordre établi. Le grand homme d’état à qui l’Italie doit son existence (puisqu’il est convenu de ne plus parler de la France, quoiqu’elle ait un peu aidé ce grand homme) était le plus décidé des révolutionnaires. Dans la plupart des questions, Gavour et Gaiibaldî marchaient d’accord ; ils différaient tout au plus sur les mesures d’exécution. La droite était, si peu conservatrice, qu’en 1862 elle renversa Ratazzi pour avoir fait respecter les lois à Aspremonte. Dans les autres pays catholiques, le noyau solide du parti conservateur est formé de l’aristocratie et des partisans de l’église. En Italie, vous ne rencontrez parmi les nobles aucune fraction qui ressemble aux légitimistes français ou aux féodaux prussiens. Presque tous les patriciens de la péninsule italienne, imbus des idées modernes, font plutôt penser aux lords anglais de la nuance la plus libérale. Dès le moyen âge, ils étaient dévoués au maintien des libertés municipales, et de nos jours ils ont toujours marché à la tête du mouvement émancipateur. D’autre part, il ne s’est pas constitué de parti clérical, parce que tous les Italiens voulaient avoir Rome pour capitale, et que le haut clergé s’est montré hostile aux aspirations nationales. Chose presque inconcevable, dans la dernière chambre, on ne comptait que trois représentans dévoués aux idées ultramontaines, et dans la chambre récemment élue il n’y en a pas beaucoup plus. L’amour de la patrie l’emportait sur les autres sentimens, et celui qui par exception mettait au-dessus de tout les intérêts temporels du Vatican, celui-là devait renoncer à obtenir les suffrages de ses concitoyens. La confiscation et la mise en vente des biens ecclésiastiques ne rencontra jamais d’opposition sérieuse. Le sénat, ce corps conservateur par destination expresse, vota sans hésiter la loi qui imposait le service militaire même à ceux qui se préparaient à entrer dans les ordres. La résistance que certains évêques opposèrent à des lois adoptées par le parlement ne souleva nulle part une réprobation plus énergique que chez les membres de la droite. M. Jacini nous rapporte le mot que lui disait un