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Grand Prix automobile de Belgique 1966

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Grand Prix de Belgique 1966
Tracé de la course
Données de course
Nombre de tours 28
Longueur du circuit 14,100 km
Distance de course 394,800 km
Conditions de course
Météo temps couvert et piste sèche au départ, pluie battante durant la course
Résultats
Vainqueur John Surtees,
Ferrari,
h 9 min 11 s 3
(vitesse moyenne : 183,360 km/h)
Pole position John Surtees,
Ferrari,
min 38 s 0
(vitesse moyenne : 232,844 km/h)
Record du tour en course John Surtees,
Ferrari,
min 18 s 7
(vitesse moyenne : 196,212 km/h)

Le Grand Prix de Belgique 1966 (XXVIe Grand Prix de Belgique / XXVI Grote Prijs van Belgie), disputé sur le circuit de Spa-Francorchamps le , est la cent-quarante-troisième épreuve du championnat du monde de Formule 1 courue depuis 1950 et la deuxième manche du championnat 1966.

Contexte avant la course

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Le championnat du monde

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Après cinq années de Formule 1 1 500 cm3, formule dérivée de l'ancienne Formule 2 en vigueur de 1957 à 1960, la Commission sportive internationale (C.S.I.) a décidé lors de son comité exécutif de décembre 1963 de porter à trois litres la cylindrée des nouvelles F1, mesure entrée en vigueur le 1er janvier 1966. Le nouveau règlement autorise à nouveau l'utilisation de moteurs suralimentés, avec un coefficient deux pour la cylindrée (soit un maximum de 1 500 cm3 en cas d'utilisation d'un compresseur volumétrique ou d'un turbocompresseur). La réglementation s'appuie sur les points suivants[1] :

  • pas de cylindrée minimale
  • cylindrée maximale : 3 000 cm3 si moteur atmosphérique ou 1 500 cm3 si moteur suralimenté
  • poids minimal : 500 kg (à sec)
  • roues non carénées
  • double circuit de freinage obligatoire
  • arceau de sécurité obligatoire (le haut du cerceau devant dépasser le casque du pilote)
  • démarreur de bord obligatoire
  • carburant commercial obligatoire
  • ravitaillement en huile interdit durant la course
  • distance minimale d'un Grand Prix : 300 km
  • distance maximale d'un Grand Prix : 400 km
  • distance minimale pour être classé : 90% de la distance parcourue par le vainqueur
Brabham BT19
En s'imposant à Silverstone, le pilote-constructeur Jack Brabham a démontré le potentiel de sa nouvelle BT19.

Les premiers Grands Prix de la saison 1966 furent composés de plateaux hétéroclites, certains constructeurs faisant appel à des anciens châssis hâtivement adaptés à la nouvelle réglementation pour pallier le retard pris dans la réalisation et la mise au point de leurs monoplaces «3 litres». Et lors du Grand Prix de Monaco, épreuve inaugurale du championnat, aucune des nouveautés engagées ne parvint à couvrir la distance, la victoire revenant à la BRM de Jackie Stewart, une ex F1 «1 500 cm3» lestée et dotée d'un moteur réalésé à deux litres. Les débuts en course des modèles 1966 des équipes BRM et Lotus sont toutefois attendus en Belgique, ainsi que ceux de l'Eagle du pilote-constructeur Dan Gurney. Malgré l'absence de Honda, l'épreuve ardennaise s'avère plus ouverte que les manches précédentes où seules les écuries Brabham, Cooper, Ferrari et enfin McLaren avaient aligné leurs modèles «3 litres». Si la puissante Ferrari V12 (étrennée victorieusement par John Surtees au Grand Prix de Syracuse) a la faveur des pronostics, le net succès de Jack Brabham lors du dernier International Trophy, à Silverstone[2], a montré que la nouvelle formule pouvait réserver bien des surprises.

C'est à l'occasion d'une course motocycliste, en 1921, que les routes reliant Francorchamps, Malmedy et Stavelot servirent de cadre à une compétition. Depuis, le tracé est régulièrement utilisé pour l'organisation d'événements tels que les 24 Heures de Spa, le Grand Prix automobile de Belgique, le Grand Prix moto de Belgique ou plus récemment les 1000 km de Spa-Francorchamps (épreuve d'endurance automobile). Caractérisé par un relief marqué, il comporte de nombreuses courbes très rapides, le seul passage «lent» étant l'épingle de la Source, dernier virage de ce circuit développant plus de quatorze kilomètres. Auteur d'un tour à 224,2 km/h au volant de sa Ferrari 330 P3 à l'occasion des derniers 1000 km de Spa, le pilote britannique Mike Parkes s'est récemment attribué le record officiel de la piste[3].

Après Monaco, l'équipe du film Grand Prix, dirigée par John Frankenheimer, a investi le circuit de Francorchamps où doivent être tournées des séquences réunissant pilotes et journalistes, ainsi que des scènes de l'épreuve. Mandaté par la Metro-Goldwyn-Mayer, Phil Hill disposera cette fois d'une McLaren M3A, une monoplace de Formule Libre à moteur V8 Ford, pour tourner les scènes réelles, tant aux essais qu'en course ; l'équipe restera sur place la semaine suivante, Hill disposant d'une autre voiture-caméra, une Ford GT40 qui tractera des monoplaces de Formule 3 maquillées en F1 pour les séquences fictives. Parmi les acteurs principaux présents, seul James Garner (qui après avoir suivi des cours s'est très vite révélé un excellent pilote) a obtenu des producteurs l'autorisation de conduire des monoplaces durant le tournage[4].

Monoplaces en lice

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  • Lotus 33 & 43 "Usine"
Lotus 43
Peter Arundell pilotera la nouvelle Lotus 43, à moteur BRM 16 cylindres.

Le Team Lotus dispose de sa nouvelle Lotus 43 à moteur BRM 16 cylindres, qui fera ses débuts en piste aux mains de Peter Arundell, le champion du monde Jim Clark préférant conserver sa monture habituelle, une 33 équipée de la dernière version MkIX du V8 Climax FWMV (1970 cm3, injection indirecte Lucas, 240 chevaux à 8800 tr/min[5]). Lestée pour satisfaire au poids minimal de 500 kg, la 33, à châssis monocoque, est équipée d'une boîte de vitesses ZF à cinq rapports[6]. Dérivée de la Lotus 38 victorieuse aux 500 miles d'Indianapolis 1965, la 43 est également dotée d'une structure monocoque mais ne comporte pas de pontons arrière, le moteur BRM étant porteur. Ce H16 est identique à celui monté sur les nouvelles BRM F1. Il comprend deux bancs de huit cylindres superposés ; alimenté par injection indirecte Lucas, il développe environ 400 chevaux à 10000 tr/min[7]. La 43 utilise la même boîte que la 33 et pèse 680 kg à vide. Les Lotus officielles sont chaussées de pneus Firestone[8].

  • Lotus 25 & 33 privées

Tim Parnell avait initialement engagé deux monoplaces pour cette épreuve, une 33 à moteur V8 BRM (2 litres, 260 chevaux) pour Mike Spence ainsi qu'une Lotus 25C dotée d'un ancien moteur Climax FPF (quatre cylindres, 2,7 litres, 260 chevaux) pour Paul Hawkins mais ce dernier a préféré mettre un terme à sa carrière en F1 et seule la voiture de Spence est présente. Elle est équipée d'une boîte de vitesses Hewland à cinq rapports et de pneus Firestone[6].

  • BRM P261 & P83 "Usine"

Malgré le retard initial pris dans le développement du moteur H16, Graham Hill et Jackie Stewart ont maintenant chacun leur nouvelle P83. Ces monoplaces ayant très peu roulé, les pilotes disposent toujours de leurs P261 à moteur V8 deux litres (injection indirecte Lucas, 260 chevaux à 10000 tr/min). Les deux modèles utilisent une boîte six vitesses conçue et réalisée en interne. Nettement moins puissantes que les P83 données pour 400 chevaux, les P261 ont pour principal atout leur légèreté (500 kg contre près de 690 pour la P83[8]) et leur parfaite mise au point. Les BRM utilisent des pneus Dunlop.

  • BRM P261 privée

L'équipe Chamaco engage sa P261 que se partageront Bob Bondurant et Vic Wilson durant les essais, à l'issue desquels le plus rapide sera retenu pour la course. Contrairement à l'équipe d'usine, le Tean Chamaco utilise des pneus Goodyear.

  • Brabham BT19 & BT22 "Usine"

La réalisation de la nouvelle BT20 n'est pas tout à fait achevée et Jack Brabham utilise une nouvelle fois sa BT19, initialement dessinée pour disputer la saison 1965 avec le seize cylindres Climax FWMW ; la société Coventry Climax ayant renoncé à ce projet après les premiers essais sur banc[9], Brabham et son associé Ron Tauranac, après avoir récupéré un lot de blocs V8 d'Oldsmobile F85, ont adapté la BT19 à ce moteur, dont la société australienne Repco a réalisé une version trois litres[10]. La dernière version de ce V8, développant 300 chevaux à 6800 tr/min, n'a pas tenu la distance à Monaco et le champion australien dispose en Belgique d'une version un peu moins puissante[11]. Conçue autour d'un châssis multitubulaire, la BT19 est dotée d'une boîte de vitesses Hewland à cinq rapports. Elle pèse 530 kg à vide[12]. Épaulant le pilote-constructeur, Denny Hulme dispose depuis le début de saison d'un modèle intermédiaire, une ancienne BT11 sur laquelle a été greffé un ancien moteur quatre cylindres Climax de 2,5 litres délivrant 225 chevaux à 6800 tr/min. Rebaptisée BT22, elle utilise une boîte 'cinq' ZF et pèse 500 kg. Les Brabham sont chaussées de pneus Goodyear[13].

  • Ferrari 246 & 312 "Usine"

Comme à Monaco, la Scuderia Ferrari aligne deux 312 à moteur V12 initialement développé pour les courses d'endurance, ainsi que d'une 246 conçue au départ pour la Formule Tasmane. Bien que s'étant régulièrement plaint de la lourdeur (plus de 600 kg) de la 312 depuis le début de saison[14], John Surtees va l'utiliser plus volontiers sur le rapide circuit ardennais, où grâce aux 350 chevaux à 9500 tr/min du V12 alimenté par un système d'injection Lucas elle devrait s'avérer plus performante que la 246 dont le V6 de 2417 cm3 délivre environ 260 chevaux à 7800 tr/min. Lorenzo Bandini aura quant à lui le choix entre les deux modèles, le pilote italien ayant jusqu'à présent privilégié la 246, plus légère (505 kg) et beaucoup plus facile à maîtriser. Les trois voitures ont un châssis semi-monocoque et sont équipés d'une boîte cinq vitesses. L'écurie dispose de pneus Dunlop et de pneus Firestone[15].

  • Cooper T81 "Usine"

Reprise en 1965 par le Chipstear Motor Group, la Cooper Car Company reste toujours techniquement dirigée par John Cooper, mais c'est désormais l'ancien pilote Roy Salvadori qui assume le rôle de directeur sportif. Le groupe repreneur étant dirigé par un des principaux concessionnaires Maserati en Grande-Bretagne, le constructeur italien a été approché pour fournir à l'écurie de Formule 1 des moteurs V12 dérivés de celui testé en 1957, sans succès, sur une version de la 250F. Avec une cylindrée portée à 2989 cm3, le V12 Tipo 9, alimenté par un système d'injection Lucas, a une puissance théorique de 360 chevaux à 9000 tr/min, mais n'en délivre actuellement que 340 dans sa version à simple allumage. Associé à une boîte de vitesses ZF à cinq rapports, ce moteur est monté sur les nouvelles T81, conçues par Derrick White, premières monoplaces à structure monocoque réalisées par le constructeur de Surbiton. Les deux modèles officiellement engagés par l'écurie sont de nouveau aux mains de Jochen Rindt et de Richie Ginther. Pesant 605 kg, les Cooper sont chaussées de pneus Dunlop[16].

  • Cooper T81 privées

Aux couleurs près, les T81 engagées par les équipes privées sont identiques aux voitures engagées par l'usine. Ayant créé sa propre structure, Joakim Bonnier utilise toutefois des pneus Firestone alors que Guy Ligier (engagé à titre privé) et Joseph Siffert (qui pilote pour le compte de Rob Walker) utilisent des pneus Dunlop[15].

  • McLaren M2B "Usine"
Eagle T1F
L'Eagle T1F de Dan Gurney.

Faute de moteur fiable, les débuts en F1 de l'équipe sont loin d'avoir répondu aux attentes de Bruce McLaren. Si la M2B à structure monocoque, conçue par l'ingénieur britannique Robin Herd, possède un excellent châssis, doté d'une rigidité remarquable, l'option du V8 Ford initialement conçu pour les 500 miles d'Indianapolis s'est révélée catastrophique. Les cinq blocs acquis par le pilote-constructeur ont été modifiés par le motoriste Traco, chargé de réduire la cylindrée à trois litres, mais les premiers tests se sont révélés désastreux : censé délivrer 335 chevaux, le V8 en fournissait à peine 300 au banc et quatre des cinq moteurs ont cassé au cours des essais, obligeant l'équipe à n'aligner qu'une seule voiture à Monaco, faute de moteur disponible pour la monoplace destinée à Chris Amon[17]. Une fuite d'huile s'étant déclarée en course, une profonde refonte du V8 Ford s'avère nécessaire et McLaren a provisoirement fait monter un moteur Serenissima sur sa monoplace pour participer à l'épreuve belge. Ce V8 à 90°, alimenté par quatre carburateurs double-corps Weber, délivre 260 chevaux. Équipée d'une boîte ZF à quatre rapports, la M2B pèse plus 550 kg dans cette configuration. Elle est chaussé de pneus Firestone. Une seule monoplace a pu être alignée et Chris Amon a une nouvelle fois dû déclarer forfait[18].

  • Eagle T1F "Usine"

Le développement du moteur V12 Weslake ayant pris plusieurs mois de retard, Dan Gurney s'est procuré quatre anciens moteurs Climax FPF de 2,7 litres pour pouvoir faire courir son Eagle T1F[Note 1], monoplace à structure monocoque conçue par Len Terry. Manquant de préparation, ces moteurs développent à peine plus de 220 chevaux, une puissance bien modeste pour propulser cette voiture de 530 kg, dotée d'une boîte cinq vitesses Hewland. Gurney utilise des pneus Goodyear[19].

Coureurs inscrits

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Liste des pilotes inscrits[20]
no  Pilote Écurie Constructeur Modèle N° châssis Moteur Pneumatiques
3 Jack Brabham Brabham Racing Organisation Brabham Brabham BT19 F1-1-65 Repco 620 V8 G
4 Denny Hulme Brabham Racing Organisation Brabham Brabham BT22 F1-1-64 Coventry Climax FPF L4 G
6 John Surtees SpA Ferrari SEFAC Ferrari Ferrari 312 312/0010 Ferrari 218 V12 D[Note 2]
7 Lorenzo Bandini SpA Ferrari SEFAC Ferrari Ferrari 246
Ferrari 312
246/0006
312/0011
Ferrari 228 V6
Ferrari 218 V12
F[Note 3]
F
8 Bob Bondurant
Vic Wilson
Team Chamaco-Collect BRM BRM P261 2615[Note 4] BRM P60 V8 G
10 Jim Clark Team Lotus Lotus Lotus 33 33 R11 Coventry Climax FWMV MkIX V8 F
11 Peter Arundell Team Lotus Lotus Lotus 43 43/1 BRM P75 H16 F
14 Graham Hill Owen Racing Organisation BRM BRM P261
BRM P83
2616
8301
BRM P60 V8
BRM P75 H16
D
D
15 Jackie Stewart Owen Racing Organisation BRM BRM P261
BRM P83
2617
8302
BRM P60 V8
BRM P75 H16
D
D
16 Mike Spence Reg Parnell Racing Lotus Lotus 33 33 R13 BRM P56 V8 F
17 Paul Hawkins Reg Parnell Racing Lotus Lotus 25C 25 R7 Coventry Climax FPF L4 F
18 Richie Ginther Cooper Car Company Cooper Cooper T81 F1-6-66 Maserati 9/F1 V12 D
19 Jochen Rindt Cooper Car Company Cooper Cooper T81 F1-3-66 Maserati 9/F1 V12 D
20 Joakim Bonnier Anglo-Suisse Racing Cooper Cooper T81 F1-5-66 Maserati 9/F1 V12 F
21 Joseph Siffert Rob Walker Racing Team Cooper Cooper T81 F1-2-66 Maserati 9/F1 V12 D
22 Guy Ligier Privé Cooper Cooper T81 F1-4-66 Maserati 9/F1 V12 D
24 Bruce McLaren Bruce McLaren Motor Racing McLaren McLaren M2B M2B/2 Serenissima M166 V8 F
25 Chris Amon Bruce McLaren Motor Racing McLaren McLaren M2B M2B/1 Ford 406 V8 F
27 Dan Gurney Anglo-American Racers Eagle Eagle T1F 101 Coventry Climax FPF L4 G
Pilote non inscrit admis en piste
no  Pilote Écurie Constructeur Modèle N° châssis Moteur Pneumatiques Commentaire
28 Phil Hill Metro-Goldwyn-Mayer McLaren McLaren M3A M3A/3[Note 5] Ford Windsor V8 G monoplace équipée d'une caméra (avant ou arrière aux essais, à l'avant droit en course)

Qualifications

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Deux séances qualificatives sont prévues, les vendredi et samedi après-midi précédant la course[21].

Première séance - vendredi 10 juin

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BRM P261
La BRM P261 de Jackie Stewart. À son volant, le pilote écossais s'est montré l'un des plus rapides de la première journée d'essais.

Le temps est chaud et ensoleillé pour la première session qualificative, le vendredi après-midi. Sur sa BRM V8, Jackie Stewart est le premier à prendre la piste et il va d'emblée accomplir une série de tours très rapides, établissant un nouveau record officieux de la piste à plus de 229 km/h de moyenne. Son coéquipier Graham Hill, aux prises avec un moteur chauffant exagérément, ne peut défendre totalement ses chances, tout comme Jim Clark, une fuite d'eau apparaissant rapidement sur son moteur Climax ; une culasse est fêlée et le champion du monde ne pourra repartir, l'équipe Lotus ne disposant pas d'un moteur de rechange. Son coéquipier Peter Arundell ne s'est pas montré plus chanceux : après seulement trois tours, une soupape de son moteur seize cylindres s'est brisée, mettant fin aux essais de la nouvelle monoplace 3 litres, encore loin d'être au point[11]. Au sein de la Scuderia Ferrari, alors que Lorenzo Bandini a opté pour la «petite» monoplace à moteur V6, John Surtees commence à tourner sur sa V12, chaussée de pneus Dunlop. Il va progressivement améliorer ses chronos et parvient à battre de six dixièmes de seconde le temps de référence réalisé par Stewart. Il fait ensuite monter les pneus Firestone, avec lesquels il terminera la séance, réalisant le meilleur temps de la journée à 230,3 km/h de moyenne, battant de plus d'une seconde son adversaire écossais[22]. Bien que déçu par le manque de puissance de son nouveau moteur, Jack Brabham réalise le troisième temps de la journée, à plus de trois secondes toutefois de Surtees. Le pilote-constructeur australien devance Bandini alors que malgré leurs ennuis mécaniques Hill et Clark ont respectivement obtenu les cinquième et sixième temps. Pour ses premiers tours de roue, la nouvelle Eagle de Dan Gurney a rencontré de nombreux problèmes mécaniques et le pilote californien n'a pas été en mesure de tourner dans de bonnes conditions, pas plus que Bruce McLaren, dont le V8 Serenissima a continuellement des ratés. Les deux pilotes de l'écurie Cooper Car Company n'ont pu effectuer que quelques tours avant qu'une boîte de vitesse ne casse sur la voiture de Richie Ginther et que le moteur Maserati de Jochen Rindt ne le lâche. Pour le compte de la Metro-Goldwyn-Mayer, Phil Hill a effectué deux heures de prises de vue au volant de sa McLaren munie d'une énorme caméra, gênant parfois les autres pilotes qui s'en plaindront auprès de la direction de course[15].

Résultats de la première séance[22]
Pos. Pilote Écurie Temps Écart
1 John Surtees Ferrari 3 min 40 s 4
2 Jackie Stewart BRM 3 min 41 s 5 + 1 s 1
3 Jack Brabham Brabham-Repco 3 min 43 s 5 + 3 s 1
4 Lorenzo Bandini Ferrari 3 min 43 s 8 + 3 s 4
5 Graham Hill BRM 3 min 45 s 6 + 5 s 2
6 Jim Clark Lotus-Climax 3 min 45 s 8 + 5 s 4
7 Joakim Bonnier Cooper-Maserati 3 min 46 s 5 + 6 s 1
8 Mike Spence Lotus-BRM 3 min 46 s 9 + 6 s 5
9 Denny Hulme Brabham-Climax 3 min 51 s 4 + 11 s 0
10 Bob Bondurant BRM 3 min 51 s 9 + 11 s 5
11 Jochen Rindt Cooper-Maserati 3 min 53 s 0 + 12 s 6
12 Guy Ligier Cooper-Maserati 3 min 55 s 5 + 15 s 1
13 Dan Gurney Eagle-Climax 3 min 57 s 6 + 17 s 2
14 Bruce McLaren McLaren-Serenissima 3 min 57 s 6 + 17 s 2
15 Phil Hill McLaren-Ford 4 min 01 s 7 + 21 s 3
16 Vic Wilson BRM 4 min 26 s 0 + 45 s 6
17 Peter Arundell Lotus-BRM 5 min 01 s 2 + 1 min 20 s 8

Deuxième séance - samedi 11 juin

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Ferrari 312
La Ferrari 312 à moteur V12 de Lorenzo Bandini. Contrairement à son coéquipier John Surtees, le pilote italien ne va presque pas tourner à son volant, se sentant plus à l'aise sur la monoplace à moteur V6.

Le temps est une nouvelle fois chaud et ensoleillé pour la séance du samedi après-midi. Prévu à seize heures, elle ne commencera que trois quarts d'heure plus tard, les pompiers devant intervenir pour circonscrire un feu de forêt à Burnenville. L'association des pilotes de Grand Prix a obtenu gain de cause auprès des organisateurs, aussi Phil Hill ne sera-t-il autorisé à piloter la voiture caméra qu'en toute fin de session. Surtees est le tout premier en piste, il va profiter de l'absence de trafic pour réaliser un tour à 232,8 km/h de moyenne sur sa Ferrari sur laquelle il a conservé les pneus Firestone, améliorant de plus de deux secondes sa performance de la veille. Ne parvenant pas à égaler ses temps du vendredi avec sa BRM V8, Stewart teste ensuite sa «16 cylindres» mais, malgré sa vitesse de pointe de 300 km/h, la P83 ne donne pas entière satisfaction à son pilote qui, tout comme son coéquipier Graham Hill, n'effectuera aucun tour lancé à son volant[15]. Bénéficiant d'un nouveau moteur, Rindt va s'avérer le meilleur adversaire de Surtees, battant de quelques dixièmes le temps réalisé par Stewart la veille, plus de trois secondes toutefois derrière le pilote anglais. Bandini teste brièvement sa Ferrari V12 mais reprendra aussitôt la V6, se montrant cependant plus lent qu'en première séance, devancé par Brabham et même par Joakim Bonnier, pourtant au volant d'une Cooper privée. McLaren a à peine tourné lorsque les roulements de son V8 le trahissent et, faute de pièces de rechange, le pilote néo-zélandais doit renoncer à participer. Ayant nettement dominé ses rivaux, Surtees s'adjuge la pole position et partira à la corde de la première ligne au côté de Rindt et Stewart, Brabham et Bandini se partageant la deuxième ligne. Faute de moteur, aucun des deux pilotes du team Lotus n'a pu participer mais, contrairement à Arundell qui devra déclarer forfait pour la course, Clark pourra prendre le départ, Colin Chapman ayant été chercher une nouvelle culasse en Angleterre. Crédité de son chrono du vendredi, le champion du monde ne partira qu'en quatrième ligne, au côté de Graham Hill qui a une nouvelle fois connu des problèmes mécaniques. N'ayant pu améliorer le comportement de sa monoplace, Gurney s'élancera en dernière position.

Résultats de la deuxième séance[22]
Pos. Pilote Écurie Temps Écart
1 John Surtees Ferrari 3 min 38 s 0
2 Jochen Rindt Cooper-Maserati 3 min 41 s 2 + 3 s 2
3 Jack Brabham Brabham-Repco 3 min 41 s 8 + 3 s 8
4 Jackie Stewart BRM 3 min 41 s 9 + 3 s 9
5 Joakim Bonnier Cooper-Maserati 3 min 44 s 3 + 6 s 3
6 Lorenzo Bandini Ferrari 3 min 44 s 7 + 6 s 7
7 Mike Spence Lotus-BRM 3 min 45 s 2 + 7 s 2
8 Richie Ginther Cooper-Maserati 3 min 45 s 4 + 7 s 4
9 Graham Hill BRM 3 min 46 s 0 + 8 s 0
10 Bob Bondurant BRM 3 min 50 s 5 + 12 s 5
11 Guy Ligier Cooper-Maserati 3 min 51 s 1 + 13 s 1
12 Denny Hulme Brabham-Climax 3 min 53 s 8 + 15 s 8
13 Joseph Siffert Cooper-Maserati 3 min 53 s 8 + 15 s 8
14 Dan Gurney Eagle-Climax 3 min 58 s 1 + 20 s 1
15 Bruce McLaren McLaren-Serenissima 4 min 36 s 1 + 58 s 1

Tableau final des qualifications

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Résultats des qualifications à l'issue des deux séances d'essais
Pos. Pilote Écurie Temps Écart Commentaire
1 John Surtees Ferrari 3 min 38 s 0 temps réalisé le samedi
2 Jochen Rindt Cooper-Maserati 3 min 41 s 2 + 3 s 2 temps réalisé le samedi
3 Jackie Stewart BRM 3 min 41 s 5 + 3 s 5 temps réalisé le vendredi
4 Jack Brabham Brabham-Repco 3 min 41 s 8 + 3 s 8 temps réalisé le samedi
5 Lorenzo Bandini Ferrari 3 min 43 s 8 + 5 s 8 temps réalisé le vendredi
6 Joakim Bonnier Cooper-Maserati 3 min 44 s 3 + 6 s 3 temps réalisé le samedi
7 Mike Spence Lotus-BRM 3 min 45 s 2 + 7 s 2 temps réalisé le samedi
8 Richie Ginther Cooper-Maserati 3 min 45 s 4 + 7 s 4 temps réalisé le samedi
9 Graham Hill BRM 3 min 45 s 6 + 7 s 6 temps réalisé le vendredi
10 Jim Clark Lotus-Climax 3 min 45 s 8 + 7 s 8 temps réalisé le vendredi
11 Bob Bondurant BRM 3 min 50 s 5 + 12 s 5 temps réalisé le samedi
12 Guy Ligier Cooper-Maserati 3 min 51 s 1 + 13 s 1 temps réalisé le samedi
13 Denny Hulme Brabham-Climax 3 min 51 s 4 + 13 s 4 temps réalisé le vendredi
14 Joseph Siffert Cooper-Maserati 3 min 53 s 8 + 15 s 8 temps réalisé le samedi
15 Dan Gurney Eagle-Climax 3 min 57 s 6 + 19 s 6 temps réalisé le vendredi
16 Bruce McLaren McLaren-Serenissima 3 min 57 s 6 + 19 s 6 temps réalisé le vendredi
17 Phil Hill McLaren-Ford 4 min 01 s 7 + 23 s 7 temps réalisé le vendredi
18 Vic Wilson BRM 4 min 26 s 0 + 48 s 0 temps réalisé le vendredi
19 Peter Arundell Lotus-BRM 5 min 01 s 2 + 1 min 23 s 2 temps réalisé le vendredi

Grille de départ

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Grille de départ du Grand Prix et résultats des qualifications[21]
1re ligne Pos. 1 Pos. 2 Pos. 3

Surtees
Ferrari
3 min 38 s 0

Rindt
Cooper
3 min 41 s 2

Stewart
BRM
3 min 41 s 5
2e ligne Pos. 4 Pos. 5

Brabham
Brabham
3 min 41 s 8

Bandini
Ferrari
3 min 43 s 8
3e ligne Pos. 6 Pos. 7 Pos. 8

Bonnier
Cooper
3 min 44 s 3

Spence
Lotus
3 min 45 s 2

Ginther
Cooper
3 min 45 s 4
4e ligne Pos. 9 Pos. 10

G. Hill
BRM
3 min 45 s 6

Clark
Lotus
3 min 45 s 8
5e ligne Pos. 11 Pos. 12 Pos. 13

Bondurant
BRM
3 min 50 s 5

Ligier
Cooper
3 min 51 s 1

Hulme
Brabham
3 min 51 s 4
6e ligne Pos. 14 Pos. 15

Siffert
Cooper
3 min 53 s 8

Gurney
Eagle
3 min 57 s 6
  • Pour les besoins du tournage du film Grand Prix, le pilote américain Phil Hill s'élancera derrière les quinze concurrents à bord d'une McLaren M3A équipée d'une caméra de cinémascope fixée à l'avant droit[21].

Déroulement de la course

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Cooper T81
La Cooper T81 de Joakim Bonnier. Seul pilote chaussé de pneus pour piste sèche, le Suédois s'est fait surprendre en abordant la portion humide du circuit et a semé la pagaille au sein du peloton.

Contrastant avec les deux journées précédentes, le temps est maussade le dimanche. Faute de moteur de remplacement, Peter Arundell et Bruce McLaren ne prendront pas le départ. La monoplace de McLaren devait cependant participer pour les besoins du film Grand Prix, le pilote néo-zélandais doublant un des acteurs pour les scènes de course. Afin de ne pas perturber le tournage, il sera finalement remplacé à l'écran par Bob Bondurant (ce dernier s'etant montré beaucoup plus rapide que son compagnon d'écurie Vic Wilson), la BRM du Team Chamaco étant pour la circonstance repeinte en blanc et affublée du numéro 24, afin de faire illusion. Il n'y aura donc que quinze voitures sur la grille de départ, qui seront suivies par la voiture-caméra conduite par Phil Hill[15].

En début d'après-midi, des nuages menaçants s'amoncellent au dessus du circuit et presque tous les équipes s'empressent de monter des pneus pluie sur les monoplaces, seul Joakim Bonnier prenant le risque de conserver ses penus pour le sec. N'ayant pas testé les gommes Firestone dans ces conditions, la Scuderia Ferrari préfère revenir aux Dunlop sur la voiture de John Surtees, celle de Lorenzo Bandini étrennant les Firestone 'pluie'. En fin de matinée, une rotule de suspension a cédé sur la Team Lotus de Jim Clark alors qu'il rejoignait le circuit, aussi sa monoplace n'a-t-elle été mise en grille qu'au dernier moment. Dans la précipitation, Clark oublie d'engager une vitesse et emballe son moteur lorsque le drapeau libère les monoplaces. Il s'élancera bon dernier. La piste est encore sèche dans cette zone mais la pluie tombe déjà à l'autre bout du circuit. Exploitant au mieux sa pole position, Surtees aborde en tête le raidillon de l'Eau Rouge, devant la Cooper de Jochen Rindt et la Brabham du pilote-constructeur australien. Clark ne va accomplir que quelques centaines de mètres, le surrégime initial ayant endommagé son moteur. Dans la descente de Burnenville, la piste est très humide et Surtees va contrôler de justesse une dérobade de sa Ferrari. En milieu de peloton, Bonnier effectue une série de trois tête-à-queue à cet endroit, heurte des bottes de paille avant d'atterrir sur un muret, l'avant de sa Cooper dans le vide ! Voulant éviter une botte, Mike Spence est sorti de la piste, sa Lotus ne pouvant repartir. Joseph Siffert a dû faire un brusque écart pour l'éviter, surprenant Denny Hulme dont la Brabham percute l'arrière de la Cooper. Train faussé, Siffert renoncera un peu plus loin tandis que Hulme, biellette de direction cassée, parviendra à ramener, à faible allure, sa monoplace au stand pour y abandonner[23]. Après seulement quatre kilomètres de course, un tiers du plateau est déjà éliminé ! Cependant, les hommes de tête abordent le très rapide S de Masta. Une grand flaque d'eau se trouve sur la trajectoire. Toujours en tête, Surtees parvient à passer sans encombre mais derrière lui Rindt va effectuer une impressionnante série de tête-à-queue. Le pilote autrichien parviendra toutefois à rester sur la piste et repartira dans la bonne direction, n'ayant perdu qu'une quinzaine de secondes. Brabham, qui le suivait, fait lui-même une sévère embardée pour l'éviter et manque sortir de la route ; il parvient toutefois à reprendre le contrôle et continue la course, maintenant en deuxième position. Derrière lui, Jackie Stewart part également en toupie avant de heurter un mur, sa BRM étant alors projetée dans un fossé, réservoir de carburant crevé, son pilote étant coincé dans le cockpit[24]. Alors que Bandini passe sans encombre et se retrouve troisième, la BRM de Graham Hill se dérobe soudainement, effectue un tête à queue et s'arrête contre une meule de foin, moteur calé. Les dégâts sont minimes et le pilote britannique s'apprête à repartir lorsqu'il aperçoit la voiture de son coéquipier, en mauvaise posture. Il descend alors lui porter secours ; il déconnecte la pompe électrique avant de tenter d'extirper Stewart, conscient mais choqué, de l'habitacle déformé de la BRM. La seule solution est de démonter le volant. Entre-temps, ; empruntant une caisse à outil à un commissaire de piste, il parvient, avec l'aide de Bob Bondurant (dont la BRM est également sortie de la piste à cet endroit, finissant dans un fossé après une série de tonneaux !) à dégager le jeune écossais et à le transporter dans une ferme voisine avant d'appeler les secours[25]. Souffrant de brûlures dues au contact avec l'essence, d'une fracture à l'omoplate et d'une côte cassée, Stewart sera emmené à l'hôpital de Stavelot avant d'être hospitalisé à Londres[26]. Hill repartira au volant de sa monoplace mais, ayant perdu trop de temps pour pouvoir accomplir la distance minimale imposée pour être classé, se contentera de la ramener à son stand avant de se retirer[27].

Surtees a achevé le premier tour largement en tête, dix secondes devant Brabham et Bandini, roues dans roues. Auteur d'un départ prudent, Richie Ginther est dix secondes plus loin, suivi à une centaine de mètre par son coéquipier Rindt, reparti «le couteau entre les dents» après sa série de pirouettes. Sixième au volant de sa Cooper, Guy Ligier compte déjà une demi-minute de retard sur le premier, alors que beaucoup plus loin Dan Gurney ferme la marche sur la nouvelle Eagle, précédant de peu la McLaren de Phil Hill qui a parfaitement rempli sa mission pour le compte de MGM. Il ne reste désormais plus que sept voitures en course. Brabham est conscient que ses pneumatiques ne sont pas aussi sûrs que ceux de ses adversaires sur chaussée détrempée aussi décide-t-il de ne prendre aucun risque, laissant Bandini le dépasser[28]. La Ferrari V6 du pilote italien se comporte parfaitement sous la pluie et Bandini revient sur son coéquipier Surtees, qu'il dépasse à la fin du deuxième tour, s'emparant du commandement. C'est cependant Rindt qui est alors le plus rapide en piste, le jeune Autrichien étant remonté en troisième position, après avoir facilement débordé Ginther puis Brabham. Après le passage des quatre premiers, groupés en six secondes, il faut attendre une demi-minute pour voir apparaître la Cooper de Ginther, aux prises avec des soucis de boîte de vitesse, l'Américain précédant Ligier de quelques centaines de mètres alors que Gurney est très nettement distancé. La pluie redouble alors et Surtees repasse devant son coéquipier, qui se fait peu après également dépasser par Rindt, très à l'aise dans ces conditions. À la fin du troisième tour, l'Autrichien est revenu à moins d'une seconde du Britannique, alors que Bandini a perdu le contact avec les deux premiers. Quatrième, Brabham poursuit sa ronde solitaire, il a maintenant une vingtaine de secondes de retard alors que Ginther et Ligier sont déjà relégués à plus d'une minute. Pilotant à la limite, Rindt s'empare du commandement et prend d'emblée quelques longueurs d'avance sur Surtees. Il creuse rapidement l'écart sur la Ferrari, douze secondes séparant les deux hommes à la fin du sixième tour. Bandini, toujours troisième, est à quinze secondes de son chef de file alors que Brabham accuse déjà près de deux minutes de retard. Toujours en lutte pour la cinquième place, Ginther et Ligier sont loin derrière. Gurney, qui ferme la marche, est vraiment à la peine : il perd régulièrement plus d'une minute au tour et les hommes de tête s'apprêtent à le doubler une deuxième fois. La pluie commence cependant à faiblir et la moyenne augmente progressivement. Dans ces conditions, Surtees se rapproche progressivement de Rindt. Ligier, qui se maintenait à quelques secondes de Ginther, doit s'arrêter à son stand pour faire réparer son embrayage ; il va perdre plus d'un tour avant de pouvoir repartir. Dès lors, la course va se résumer en un duel entre Surtees et Rindt, les positions des cinq autres pilotes étant figées. Rindt continue à attaquer au maximum, tandis que Surtees semble désormais le suivre facilement, se maintenant à quelques secondes afin d'éviter les projections d'eau. Peu après la mi-course, la pluie cesse et certaines portions de la piste commencent à s'assécher. Surtees en profite pour établir le meilleur temps de la journée, à 196 km/h de moyenne. Il se rapproche encore de Rindt, d'autant plus facilement que ce dernier doit composer avec un différentiel cassé, la Cooper devenant délicate à maîtriser. Après avoir quelque peu temporisé, Surtees revient dans les roues de l'Autrichien au cours du vingt-quatrième tour et le passe dans le virage de Malmedy. Il creuse immédiatement l'écart, Rindt relâchant alors son effort pour assurer sa deuxième place. Malgré une alerte au tour suivant à cause d'une coupure d'alimentation à la sortie du virage de la Source, Surtees remporte la victoire avec plus de quarante secondes d'avance sur son valeureux adversaire. Nettement distancé par son coéquipier, Bandini termine troisième, loin devant Brabham et Ginther. Retardé par son arrêt au stand puis ralenti par un moteur ne tournant que sur onze cylindres, Ligier n'a pas accompli suffisamment de tours pour être classé. Il en va de même pour Gurney, qui termine très attardé.

Classements intermédiaires

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Classements intermédiaires des monoplaces aux premier, deuxième, troisième, quatrième, cinquième, huitième, dixième, quinzième, vingtième et vingt-cinquième tours[22],[29].

Classement de la course

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Pos Pilote Écurie Tours Temps/Abandon Grille Points
1 6 John Surtees Ferrari 28 2 h 09 min 11 s 3 1 9
2 19 Jochen Rindt Cooper-Maserati 28 2 h 09 min 53 s 4 (+ 42 s 1) 2 6
3 7 Lorenzo Bandini Ferrari 27 2 h 12 min 19 s 2 (+ 1 tour) 5 4
4 3 Jack Brabham Brabham-Repco 26 2 h 12 min 13 s 2 (+ 2 tours) 4 3
5 18 Richie Ginther Cooper-Maserati 25 2 h 12 min 30 s 9 (+ 3 tours) 8 2
Nc. 22 Guy Ligier Cooper-Maserati 24 2 h 10 min 35 s 3 (Non classé) 12
Nc. 27 Dan Gurney Eagle-Climax 23 2 h 12 min 29 s 0 (Non classé) 15
Abd. 4 Denny Hulme Brabham-Climax 1 Biellette de direction 13
Abd. 14 Graham Hill BRM 1 Retrait 9
Abd. 15 Jackie Stewart BRM 0 Accident 3
Abd. 20 Jo Bonnier Cooper-Maserati 0 Accident 6
Abd. 16 Mike Spence Lotus-BRM 0 Accident 7
Abd. 10 Jim Clark Lotus-Climax 0 Moteur 10
Abd. 24 Bob Bondurant BRM 0 Accident 11
Abd. 21 Jo Siffert Cooper-Maserati 0 Accident 14
Np. 24 Bruce McLaren McLaren-Ford Non partant (moteur)
Np. 11 Peter Arundell Lotus-BRM Non partant (moteur)

Légende :

  • Abd.=Abandon - Np.=Non partant

Pole position et record du tour

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Évolution du meilleur tour en course

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Le meilleur tour fut amélioré onze fois au cours de l'épreuve[22].

Tours en tête

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Classement provisoire du championnat à l'issue de la course

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  • Attribution des points : 9, 6, 4, 3, 2, 1 respectivement aux six premiers de chaque épreuve.
  • Pour la coupe des constructeurs, même barème et seule la voiture la mieux classée de chaque équipe inscrit des points.
  • Seuls les cinq meilleurs résultats sont comptabilisés[21].
Lorenzo Bandini
Sur le podium à l'issue de chacune des deux premières manches du championnat, Lorenzo Bandini occupe la tête du classement provisoire des pilotes.
Classement des pilotes
Pos. Pilote Écurie Points
MON

BEL

FRA

GBR

NL

ALL

ITA

USA

MEX
1 Lorenzo Bandini Ferrari 10 6 4
2 Jackie Stewart BRM 9 9 -
John Surtees Ferrari 9 - 9
4 Jochen Rindt Cooper 6 - 6
5 Graham Hill BRM 4 4 -
6 Bob Bondurant BRM 3 3 -
Jack Brabham Brabham 3 - 3
8 Richie Ginther Cooper 2 - 2
Coupe des constructeurs
Pos. Écurie Points
MON

BEL

FRA

GBR

NL

ALL

ITA

USA

MEX
1 Ferrari 15 6 9
2 BRM 9 9 -
3 Cooper-Maserati 6 - 6
4 Brabham-Repco 3 - 3
  • 4e victoire en championnat du monde pour John Surtees.
  • 40e victoire en championnat du monde pour Ferrari en tant que constructeur.
  • 40e victoire en championnat du monde pour Ferrari en tant que motoriste.
  • 1er Grand Prix de championnat du monde pour l'écurie Eagle.

Notes et références

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  1. L'appellation T1F est donnée aux Eagle MkI (châssis de Formule 1) équipées du moteur Climax, les MkI à moteur Weslake seront appelées T1G.
  2. John Surtees a également utilisé des pneus Firestone durant les essais.
  3. Lorenzo Bandini a également utilisé des pneus Dunlop durant les essais.
  4. Monoplace repeinte en blanc et pilotée par Bob Bondurant sous le numéro 24 pour la course.
  5. Voiture-caméra non engagée officiellement, utilisée pour le tournage du film Grand Prix.

Références

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  1. Johnny Rives, Gérard Flocon et Christian Moity, La fabuleuse histoire de la formule 1, Éditions Nathan, , 707 p. (ISBN 2-09-286450-5)
  2. Christian Naviaux, Les Grands Prix de Formule 1 hors championnat du monde : 1946-1983, Nîmes, Éditions du Palmier, , 128 p. (ISBN 2-914920-05-9)
  3. Revue L'Automobile n°242 - juin 1966
  4. (en) Bernard Cahier, F-stops, Pit Stops, Laughter & Tears : Memoirs of an automotive photojournalist, t. 2, Butler, Maryland (USA), Autosports Marketing Associates, , 750 p. (ISBN 0-9760392-2-2)
  5. Patrick Michel, « La famille Coventry Climax : Le roi est mort, vive le roi ! », Revue auto passion, no 25,‎
  6. a et b Pierre Abeillon, « Lotus 25 et 33 : Toujours une saison d'avance », Revue Automobile historique, no 2,‎
  7. Yves Kaltenbach, « Le 16 cylindres en compétition : BRM H 16 - 1966-67 », Revue Automobile historique, no 13,‎
  8. a et b (en) Adriano Cimarosti, The complete History of Grand Prix Motor racing, Aurum Press Limited, , 504 p. (ISBN 1-85410-500-0)
  9. Yves Kaltenbach, « Le 16 cylindres en compétition : Le Flat 16 », Revue Automobile historique, no 12,‎
  10. Christian Moity et Serge Bellu, « La galerie des championnes : 1966/67 : les Brabham-Repco V8 », Revue L'Automobile, no 396,‎
  11. a et b Revue Sport Auto no 54 -
  12. Pierre Ménard, « Brabham BT19, BT20 & BT24 : Triomphe de la simplicité », Revue Automobile historique, no 37,‎
  13. Alan Henry, Brabham : Les monoplaces de Grand Prix, Editions ACLA, , 285 p. (ISBN 2-86519-058-7)
  14. Alan Henry, Ferrari : Les monoplaces de Grand Prix, Editions ACLA, , 319 p. (ISBN 2-86519-043-9)
  15. a b c d et e (en) Denis Jenkinson, « Belgian GP. : An Italian Victory », Magazine MotorSport, no 7 Vol.XLII,‎
  16. Gérard Gamand, « Cooper 1966-1968 : La lente agonie de la Formule 1 », Revue Autodiva, no 11,‎
  17. Christian Moity, « McLaren : 10 ans de Formule 1 », Revue L'Automobile, no 364,‎
  18. Doug Nye, McLaren : Formule 1, Can-Am, Indy, Editions ACLA, , 270 p. (ISBN 2-86519-039-0)
  19. Gérard Gamand, « Eagle en Formule 1 : Le rêve américain de Dan Gurney », Revue Autodiva, no 14,‎
  20. (en) Bruce Jones, The complete Encyclopedia of Formula One, Colour Library Direct, , 647 p. (ISBN 1-84100-064-7)
  21. a b c d et e (en) Mike Lang, Grand Prix volume 2, Haynes Publishing Group, , 260 p. (ISBN 0-85429-321-3)
  22. a b c d et e (en) Autocourse : The Review of International Motor Sport 1966, Autocourse Publications Ltd, , 216 p.
  23. (en) Automobile Year no 14 1966-1967, Lausanne, Edita S.A., , 282 p.
  24. Revue Moteurs n°56 - juillet-août 1966
  25. Graham Hill, Au seuil du danger, Solar, , 317 p.
  26. Johnny Rives, L’Equipe, 50 ans de Formule 1 - tome 1 : 1950-1978, Issy-les-Moulineaux, SNC L’Equipe, , 233 p. (ISBN 2-7021-3009-7)
  27. (en) Denis Jenkinson, « Reflections on the Belgian Grand Prix », Magazine MotorSport, no 7 Vol.XLII,‎
  28. Günther Molter, Jack Brabham, Bibliothèque Marabout, , 157 p.
  29. Edmond Cohin, L'historique de la course automobile, Editions Larivière, , 882 p.