Initiative populaire « pour l'interdiction des armes atomiques »
Initiative populaire fédérale | |
Pour l'interdiction des armes atomiques | |
Déposée le | |
---|---|
Déposée par | Mouvement suisse contre l'armement atomique |
Contre-projet | non |
Votée le | |
Participation | 55,59 % |
Résultat : rejetée[NB 1] | |
Par le peuple | non (par 65,2 %) |
Par les cantons | non (par 15 6/2)[NB 2] |
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L'initiative populaire « pour l'interdiction des armes atomiques » est une initiative populaire suisse, rejetée par le peuple et les cantons le .
Contenu
[modifier | modifier le code]L'initiative propose d'ajouter un article 20bis à la Constitution fédérale afin d'interdire, au niveau fédéral, « la fabrication, l'importation, le transit, l'entrepôt et l'emploi » d'armes nucléaires.
Le texte complet de l'initiative peut être consulté sur le site de la Chancellerie fédérale[1].
Déroulement
[modifier | modifier le code]Contexte historique
[modifier | modifier le code]En 1946, le Département militaire fédéral met en place une « commission d'étude pour les questions atomiques » chargée d'examiner les différentes possibilités offertes à la Suisse en matière d'armement atomique. Par la suite, en 1957, une demande pour mettre en place une défense atomique est transmise au gouvernement fédéral par la Société suisse des officiers[2], demande approuvée par le Conseil fédéral l'année suivante dans un rapport publié le qui précise que de telles armes sont utiles « non seulement à un agresseur, mais aussi [..] à un défenseur, dont les moyens s'en trouveraient renforcés dans une très large mesure » et que, donc, « il importe par conséquent de donner à l'armée les moyens les plus efficaces, armes atomiques comprises, pour lui permettre de maintenir notre indépendance et de protéger notre neutralité »[3].
Cette déclaration, bien que présentée comme une vision stratégique et comme une déclaration de principe, provoque de vives réactions dans les pays voisins qui comprennent que la Suisse allait immédiatement procéder à l'acquisition d'armes atomiques. Ces mêmes réactions se reflètent à l'intérieur du pays ou plusieurs groupes pacifiques religieux fondent la même année le Mouvement suisse contre l'armement atomique et lancent cette initiative pour contrer la volonté du gouvernement[4].
Récolte des signatures et dépôt de l'initiative
[modifier | modifier le code]La récolte des 50 000 signatures a commencé au début du mois de juin 1958, la date exacte n'a pas été conservée. L'initiative a été déposée le à la chancellerie fédérale qui l'a déclarée valide le [5].
Discussions et recommandations des autorités
[modifier | modifier le code]Le parlement[6] et le Conseil fédéral[3] recommandent le rejet de cette initiative. Dans son rapport aux chambres fédérales, le gouvernement, tout en affimant ne pas vouloir en principe acquérir de telles armes et être conscient « du danger que constituerait pour l'humanité le déclenchement d'une guerre atomique absolue », juge que l'interdiction totale prônée par l'initiative pourrait avoir des conséquences graves selon l'évolution politique mondiale, la recherche sur les armes tactiques étant alors en plein développement.
Votation
[modifier | modifier le code]Soumise à la votation le , l'initiative est refusée par 15 6/2 cantons[NB 2] et par 65,2 % des suffrages exprimés[7]. Le tableau ci-dessous détaille les résultats par cantons[8] :
Effets
[modifier | modifier le code]En parallèle à cette initiative, une seconde, plus mesurée sur le même sujet est lancée par le Parti socialiste suisse. Elle est également rejetée en votation le [9]. À la suite de ces deux résultats, la commission mandatée par le Département militaire va poursuivre ses travaux, en particulier pour comparer la production d'armes tactiques dans le pays avec leur achat à l'étranger[2] ; sans que la question ne soit définitivement tranchée, plusieurs évènements vont faire progressivement changer d'opinion les dirigeants politiques : le manque d'uranium (dont la recherche dans les Alpes s'est révélée infructueuse) interdit la construction de plusieurs bombes, les coûts estimés à 2,1 milliards de francs sur 30 ans sont bien trop élevés alors que le déclenchement en 1964 de l'affaire des Mirages provoque une crise de confiance de la population envers l'armée[10].
Pour toutes ses raisons, le Conseil fédéral va progressivement changer d'option et défendre le concept la non-dissémination couplé à une défense conventionnelle. En 1969, la Suisse signe le traité sur la non-prolifération des armes nucléaires ; elle ne ratifie cependant ce traité qu'en 1976, à la suite d'oppositions au Conseil des États[2].
Notes et références
[modifier | modifier le code]Notes
[modifier | modifier le code]- Selon l'article 139 de la Constitution, une initiative proposée sous la forme d'un projet rédigé doit être acceptée à la fois par la majorité du peuple et par la majorité des cantons. Dans le cas d'une initiative rédigée en termes généraux, seul le vote du peuple est nécessaire.
- Le premier chiffre indique le nombre de cantons, le second le nombre de cantons comptant pour moitié. Par exemple, 20 6/2 se lit « 20 cantons et 6 cantons comptant pour moitié ».
Références
[modifier | modifier le code]- « Texte de l'initiative populaire fédérale », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
- Marco Jorio, « Armes atomiques » dans le Dictionnaire historique de la Suisse en ligne, version du .
- « Message du Conseil fédéral » (27 juillet 1961) de la Feuille fédérale référence FF 1961 II 210
- Peter Hug, « Mouvement antinucléaire » dans le Dictionnaire historique de la Suisse en ligne, version du .
- « Initiative populaire 'pour l'interdiction des armes atomiques' » (consulté le )
- « Arrêté fédéral » (30 décembre 1961) de la Feuille fédérale référence FF 1961 II 1363
- « Votation no 199 Tableau récapitulatif », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
- « Votation no 199 - Résultats dans les cantons », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
- « Votation no 203 Tableau récapitulatif », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
- Christian Bühlmann, Le développement de l'arme atomique en Suisse, Lausanne, (lire en ligne)