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Leur ascendance est confuse : la ''[[Théogonie (Hésiode)|Théogonie]]'' se contredit elle-même en citant [[Nyx]] seule au vers 217 (comme dans l’''[[Hymne orphique]]'' qui leur est consacré et ''[[Les Euménides]]'' d'[[Eschyle]]), mais [[Zeus]] et [[Thémis]] plus loin (v. 904, repris par le [[pseudo-Apollodore]]). Cet attachement à Nyx se retrouve d'ailleurs chez les auteurs [[latin]]s {{incise|dans la Préface d'[[Caius Julius Hyginus|Hygin]] et chez [[Cicéron]]}} qui citent [[Érèbe]] pour père. D'autres traditions existent, qui toutes les rattachent à des divinités primordiales ([[Ouranos]] et [[Gaïa]]) d'après des fragments de [[Lycophron]] et d'[[Athénée de Naucratis|Athénée]], ou [[Chaos (mythologie)|Chaos]] chez [[Quintus de Smyrne]]). Quant au poète crétois [[Épiménide]], il les suppose, dans une tradition isolée, nées de [[Cronos]] et d'[[Évonymé]] et sœurs à la fois d'[[Aphrodite]] et des [[Érinyes|Euménides]]. |
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Dernière version du 27 novembre 2024 à 23:18
Dans la mythologie grecque, les Moires (en grec ancien Μοῖραι / Moîrai) sont trois divinités du Destin : Clotho (« la Fileuse »), Lachésis (« la Répartitrice ») et Atropos (« l'Inflexible »). Elles sont associées aux cycles cosmiques, aux grandes déesses de la nature, de la végétation et de la fertilité[1].
Elles deviennent les Parques, dans la mythologie romaine. On retrouve des personnages similaires dans la mythologie nordique avec les Nornes, ou encore dans la mythologie lituanienne avec les Deivės Valdytojos.
Mythe
[modifier | modifier le code]Ascendance et premiers éléments
[modifier | modifier le code]Leur ascendance est confuse : la Théogonie se contredit elle-même en citant Nyx seule au vers 217 (comme dans l’Hymne orphique qui leur est consacré et Les Euménides d'Eschyle), mais Zeus et Thémis plus loin (v. 904, repris par le pseudo-Apollodore). Cet attachement à Nyx se retrouve d'ailleurs chez les auteurs latins — dans la Préface d'Hygin et chez Cicéron — qui citent Érèbe pour père. D'autres traditions existent, qui toutes les rattachent à des divinités primordiales (Ouranos et Gaïa) d'après des fragments de Lycophron et d'Athénée, ou Chaos chez Quintus de Smyrne). Quant au poète crétois Épiménide, il les suppose, dans une tradition isolée, nées de Cronos et d'Évonymé et sœurs à la fois d'Aphrodite et des Euménides.
Dans sa République, Platon en fait les filles d'Ananké, déesse de la Nécessité[2].
Elles sont désignées sous le nom d'αἶσα / aîsa dans l’Iliade[3], et ne sont citées qu'une seule fois sous le nom collectif de Μοῖραι / Moîrai (XXIV, 49). Au vers 209 du même chant XXIV, le terme Moîra est employé au singulier pour désigner une déesse unique. L’Odyssée[4] associe quant à elle aisa et κλῶθες / klỗthes (« fileuses ») ; ce dernier terme est une référence probable aux Moires, même si cette épithète ne se rencontre nulle part ailleurs. Toujours dans l’Odyssée, il semble que le rôle de fileuses du destin ne leur soit pas réservé : Zeus[5] ou même les dieux tous ensemble[6] peuvent être impliqués. De manière générale, si le terme de moïra (« destinée ») est très présent dans les épopées homériques, celle-ci n'est que rarement personnifiée sous des traits divins.
Elles apparaissent individuellement chez Hésiode, qui dénombre trois Moires qui « donnent d'avoir le bien et le mal »[7] :
- Clotho[n 1] (Κλωθώ / Klôthố, « la Fileuse ») tisse le fil de la vie ;
- Lachésis (Λάχεσις / Lákhesis, « la Répartitrice ») le déroule ;
- Atropos (Ἄτροπος / Átropos, « l'Inflexible ») le coupe.
Dans le premier passage de la Théogonie[9], leur rôle est en outre de « [poursuivre] les crimes des hommes et des dieux et [de] ne [déposer] leur terrible colère qu'après avoir exercé sur le coupable une cruelle vengeance ». Cependant, l'enchaînement des vers 218 et 219, jugé maladroit, et le fait que cette mention suive une référence donnée aux Kères, divinités chargées de traquer les criminels, font écarter ce passage comme une interpolation par plusieurs spécialistes[Qui ?] ; Martin Litchfield West l'a supprimé de son édition de la Théogonie.
Fonctions et mythes associés
[modifier | modifier le code]On peut se représenter leur travail de filage comme achevé au moment de la naissance ou se poursuivant pendant toute la vie jusqu'au moment où tout le fil a été entièrement dévidé de la quenouille. Les images employées par les poètes varient. Leur origine complexe traduit en fait le lien des Moires avec la naissance comme la mort et finalement avec le cycle complet de la vie dans une forme de cadencement du monde[10]. Dans la mythologie grecque, le Destin est parfois personnifié de façon distincte de Zeus, parfois confondu avec lui. Mais en général, Zeus et les autres dieux paraissent soumis au Destin, comme l'affirme Eschyle dans Prométhée enchaîné.
Les Moires sont présentes lors de plusieurs grands événements : lors de la gigantomachie (où elles tuent Agrios et Thoas)[11] ; lors du mariage de Pélée et de Thétis (au cours duquel elles chantent) [12] ; pour ramener la paix dans l'Olympe, lorsque les dieux à l'unisson réclament à Zeus l'immortalité pour leurs conjoints ou leurs enfants mortels[réf. nécessaire].
Lachésis, fille d'Ananké (la Nécessité), possède en outre une fonction spécifique dans la République de Platon, livre X (voir le Mythe d'Er le Pamphylien), qui lui attribue le rôle d'avoir sur ses « genoux des sorts et des modèles de vie » qui sont distribués lors d'une cérémonie à l'issue de laquelle les âmes des défunts sur le point de revenir sur terre se voient présenter les « sorts » correspondant à leur réincarnation future en hommes ou en animaux.
Culte
[modifier | modifier le code]Les Moires pouvaient être honorées comme déesses de la naissance ; les jeunes mariées athéniennes leur offraient des boucles de cheveux, et les femmes les invoquaient en prêtant serment.
Représentations dans l'art
[modifier | modifier le code]Le thème des Moires est abondamment traité dans l'histoire de l'art, dans des tableaux[n 2], des estampes[n 3], des sculptures[n 4], ou encore dans des dessins[n 5].
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Bécher, verre de Bohème à deux couches, 1848 (Victoria and Albert Museum).
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Les Moires dans Le livre des échecs amoureux d'Évrart De Conty (1400).
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Le Triomphe de la Mort, ou les Trois Moires, tapisserie flamande (Victoria and Albert Museum).
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The Night of Enitharmon's Joy, où apparaissent Hécate et les Moires. Tableau de William Blake, 1795 (Tate Gallery).
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Le roi Pélée, père d'Achille, et les trois Moires, mosaïque du bain d'Achille dans la maison de Thésée (Parc archéologique de Paphos).
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Les Trois Moires, gravure de Giorgio Ghisi d'après Jules Romain, c. 1558 (Metropolitan Museum of Art).
Notes et références
[modifier | modifier le code]Notes
[modifier | modifier le code]- On verra son nom aussi francisé en Clothon à partir de la fin du XVIe siècle[8].
- Voir les peintures représentant les Moires sur Wikimedia Commons.
- Voir les estampes représentant les Moires sur Wikimedia Commons.
- Voir les sculptures représentant les Moires sur Wikimedia Commons.
- Voir les dessins représentant les Moires sur Wikimedia Commons.
Références
[modifier | modifier le code]- Vinciane Pirenne-Delforge, L’Aphrodite grecque : Contribution à l’étude de ses cultes et de sa personnalité dans le panthéon archaïque et classique, Liège, Centre international d'étude de la religion grecque, , 554 p. (lire en ligne) (revue Kernos - supplément no 4)
- Brisson 2002, p. 1788
- Homère, Iliade [détail des éditions] [lire en ligne], XX, 127.
- Homère, Odyssée [détail des éditions] [lire en ligne], VII, 196.
- Odyssée, IV, 207.
- Odyssée, I, 17-18.
- Hésiode 1993, p. 75
- Travail collectif, La tragédie à l'époque d'Henri III, t. IV, Olschki, p. 237
- v. 217 et passim
- Vinciane Pirenne-Delforge et Gabriella Pironti, « Les Moires entre la naissance et la mort : de la représentation au culte », Études de lettres, nos 3-4, , p. 93–114 (ISSN 0014-2026, DOI 10.4000/edl.143, lire en ligne, consulté le )
- Pseudo-Apollodore, Bibliothèque [détail des éditions] [lire en ligne] (I, 6, 2)
- Catulle, poème 64, vers 305 : https://www.lelatiniste.net/l-antiquit%C3%A9-documentation/mythologie/ariane-et-th%C3%A9s%C3%A9e-po%C3%A8me-64-en-fran%C3%A7ais/
Annexes
[modifier | modifier le code]Bibliographie
[modifier | modifier le code]- L’Odyssée (trad. du grec ancien par Victor Bérard), Éditions Gallimard, (1re éd. 1955) (ISBN 2-07-010261-0).
- (fr) L’Iliade (trad. du grec ancien par Robert Flacelière), Éditions Gallimard, (1re éd. 1955) (ISBN 2-07-010261-0).
- Émile Chambry, Alain Billault, Émeline Marquis et Dominique Goust (trad. Émile Chambry, préf. Alain Billault), Lucien de Samosate : Œuvres complètes, Éditions Robert Laffont, coll. « Bouquins », , 1248 p. (ISBN 978-2-221-10902-1), « Le Tyran ».
- Luc Brisson, Platon : La République : Introduction, GF Flammarion, , 799 p. (ISBN 978-2-08-121810-9)
- Georges Leroux (dir.) et Luc Brisson, La République, Éditions Gallimard, (1re éd. 2006) (ISBN 978-2-08-121810-9)
- Hésiode (trad. Annie Bonnafé, préf. Jean-Pierre Vernant), Théogonie, Paris, Payot & Rivages, coll. « La Petite Bibliothèque », , 184 p. (ISBN 978-2-7436-2138-4).
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
Articles connexes
[modifier | modifier le code]- Moïra, la notion de destinée
- Parques, dans la mythologie romaine
- Nornes, dans la mythologie nordique
- Ananké (mythologie)
- (273) Atropos
- Érèbe
Liens externes
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- Ressource relative à la bande dessinée :
- Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies généralistes :
- Pseudo-Apollodore, Bibliothèque [détail des éditions] [lire en ligne] (I, 3, 1)
- Cicéron, De natura deorum [détail des éditions] [lire en ligne] (III, 17)
- Eschyle, Euménides [détail des éditions] [lire en ligne] (v. 973)
- Pseudo-Hésiode, Bouclier d'Héraclès [détail des éditions] [lire en ligne] (v. 258-263)
- Théogonie [détail des éditions] [lire en ligne] (v. 217-219 ; 901-906)
- Homère, Iliade [détail des éditions] [lire en ligne] (IV, 517 ; V, 83 et 613; XII, 116 ; XIV, 849; XVI, 433 ; XIX, 87 ; XX, 127-128 ; XXIV, 49, 132 et 209)
- Odyssée [détail des éditions] [lire en ligne] (I, 17-18 ; III, 269 ; IV, 207-208 ; VII, 196-198 ; XI, 292)
- Hygin, Fables [détail des éditions] [(la) lire en ligne] (Préface, I ; CCXXVII)
- Hymnes orphiques [détail des éditions] (lire en ligne) (LVI aux Moires)
- Nonnos de Panopolis, Dionysiaques [détail des éditions] [lire en ligne] (VI, 94 ; VII, 106 ; VIII, 351 ; XI, 255)
- Pindare, Odes [détail des éditions] (lire en ligne) (Olympiques, I, VI, VII, X)
- Platon, La République [détail des éditions] [lire en ligne] , Livre X (617c)
- Quintus de Smyrne, Suite d'Homère [détail des éditions] [lire en ligne] (III, 755)
- Stace, Thébaïde [détail des éditions] [lire en ligne] (III, 556)