Un nouvel archevêque pour un nouveau président. Le pape François a nommé lundi 6 janvier le cardinal Robert McElroy archevêque de Washington, auparavant évêque de San Diego (Californie). Il succède ainsi au cardinal Wilton Gregory, premier Afro-Américain à avoir reçu la barrette pourpre. À presque 71 ans, ce natif de San Francisco devrait occuper son siège épiscopal pour quatre années avant d’atteindre la limite d’âge. Soit une période aussi longue qu’un mandat présidentiel aux États-Unis.

Soutien du synode, défenseur de Joe Biden durant les débats au sein de l’Église américaine sur l’accès aux sacrements pour les hommes politiques favorables à l’avortement… En choisissant un adhérent sans réserve à ses orientations, le pape François envoie un signe fort en direction de la Maison-Blanche. Alors que les catholiques ont porté le conservateur Donald Trump au pouvoir, François aurait-il décidé de faire de l’archevêché de la capitale américaine un lieu de contre-pouvoir ?

Un cardinal « libéral »

Avec la nomination l’ancien évêque de San Diego à Washington DC, le pape envoie dans la capitale fédérale un « libéral », héraut de « l’inclusion radicale » des minorités LGBT et voix forte pour l’accueil des migrants. Deux thématiques sur lesquelles Donald Trump avait axé sa campagne, promettant notamment de mettre fin à « la folie transgenre » une fois élu. Et par la même occasion un message fort aux catholiques et surtout à la nouvelle administration américaine. L’annonce du nouvel archevêque de « DC » devrait provoquer des débats houleux au sein du catholicisme américain : sa création cardinalice avait déjà suscité l’ire de l’aile conservatrice.

Déjà en 2017, après la première investiture de Donald Trump à la présidence, le cardinal McElroy avait appelé les catholiques à devenir des « perturbateurs ». « Nous devons perturber ceux qui cherchent à envoyer des troupes dans nos rues pour expulser les sans-papiers, pour arracher des mères et des pères à leur famille. Nous devons perturber ceux qui dépeignent les réfugiés comme des ennemis plutôt que comme nos frères et sœurs qui ont terriblement besoin d’aide. Nous devons perturber ceux qui nous entraînent à voir les hommes, les femmes et les enfants musulmans comme des forces de la peur plutôt que comme des enfants de Dieu », avait-il déclaré à l’époque.

Articulation entre politique et théologie

Le nouvel archevêque de Washington est, au sein de l’épiscopat outre-Atlantique, l’un des penseurs de l’articulation entre politique et théologie catholique. Selon la presse américaine, cet aspect aurait encouragé François à placer le cardinal McElroy dans la capitale. « Le pape envoie dans la capitale le seul évêque américain qui a une compréhension profonde de la Constitution américaine et de la religion et qui y a réfléchi pendant toute sa vie d’adulte », a déclaré auprès du Washington Post Michael Sean Winters, chroniqueur de longue date pour le site spécialisé National Catholic Reporter.

Selon The Pillar, un autre site d’information catholique attaché à « aider l’Église à mieux servir sa mission sacrée, le salut des âmes », l’élection de Donald Trump aurait convaincu François d’envisager la nomination de celui qui s’était dressé contre le mur de séparation à la frontière entre les États-Unis et le Mexique en 2016, après l’avoir d’abord écartée dès le mois d’octobre 2024.

Ordonné prêtre en 1980 après une scolarité effectuée chez les sulpiciens, le cardinal McElroy devra également s’atteler à redresser un diocèse dans une situation financière délicate. Le diocèse demeure de surcroît empêtré dans les suites de l’affaire McCarrick, archevêque de Washington entre 2000 et 2006 et renvoyé de l’état clérical en 2019 pour de multiples violences sexuelles sur des jeunes hommes. La gestion de ce cas par le cardinal McElroy a fait l’objet de critiques : alerté en 2016, il avait été accusé de ne pas avoir pris au sérieux les allégations à l’encontre de son prédécesseur.