Sexualité des Français : des rapports moins fréquents, mais des pratiques plus variées
L’Inserm et l’ANRS-Maladies infectieuses émergentes ont publié mercredi 13 novembre une grande enquête sur la sexualité des Français. En près de vingt ans, les pratiques ont beaucoup changé. La sexualité est désormais plus variée, moins majoritairement hétérosexuelle et avec des rapports moins fréquents.
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Que se passe-t-il dans la chambre des Français ? L’Inserm et l’ANRS-Maladies infectieuses émergentes ont interrogé 31 518 personnes âgées de 18 à 89 ans, représentatives de la population, dans l’Hexagone mais aussi, pour la première fois, dans les territoires ultramarins. Les premiers résultats de l’enquête « Contexte des sexualités en France 2023 » pour la métropole ont été présentés mercredi 13 novembre. Il s’agit de la quatrième enquête nationale sur ce sujet intime depuis 1970. La précédente remontait à 2006.
En près de vingt ans, les pratiques sexuelles des Français ont évolué. Ainsi, l’âge médian au premier rapport sexuel, c’est-à-dire l’âge auquel la moitié de la population a eu son premier rapport, a légèrement augmenté pour les deux sexes. En 2019-2023, il était de 18,2 ans pour les femmes et 17,7 ans pour les hommes. Une tendance qui s’observe également dans d’autres pays et qui serait en partie due à l’épidémie de Covid, selon les auteurs.
Augmentation de l’âge du 1er rapport sexuel
Le nombre moyen de partenaires sexuels au cours de la vie a, en revanche, augmenté dans toutes les générations, entre 18 et 69 ans, même si l’écart est toujours marqué entre les femmes (7,9 en 2023 contre 4,5 en 2006) et les hommes (16,4 en 2023 contre 11,9 en 2006). La définition du partenaire sexuel ne serait peut-être pas la même pour les uns et les autres, avance Nathalie Bajos, sociologue et directrice de recherche à l’Inserm : « Les femmes ne compteraient que les hommes qui comptent ».
Le répertoire des pratiques sexuelles, lui aussi, s’est diversifié. En 2023, 72,9 % des femmes et 92,6 % des hommes de 18-69 ans déclaraient avoir déjà pratiqué la masturbation et 57,7 % et 38,9 % la pénétration anale. Cette diversification est surtout notable chez les femmes, selon l’enquête. « Ces évolutions donnent à voir l’élargissement des répertoires sexuels observé depuis le début des années 1970, qui dessine une sexualité beaucoup plus diversifiée et de moins en moins restreinte aux rapports avec une pénétration vaginale », analysent les auteurs qui soulignent, là aussi, des écarts toujours marqués entre les déclarations des femmes et celle des hommes.
L’arrivée du numérique a également révolutionné les comportements : 33 % des femmes et 46,6 % des hommes ont eu une expérience sexuelle en ligne avec une autre personne (connexion à un site dédié, rencontre d’un partenaire ou échange d’images intimes). L’enquête relève aussi une diversité des orientations sexuelles : 8,4 % des femmes et 7,5 % des hommes ont déjà eu au moins un partenaire de même sexe. « Ces expériences sont beaucoup plus fréquentes chez les personnes de 18 à 29 ans et pour la première fois en 2023, les femmes déclarent plus de rapports homosexuels que les hommes », précise l’enquête.
L’activité sexuelle diminue
Si les pratiques se diversifient, l’activité sexuelle, elle, diminue, paradoxalement. Le nombre de rapports sexuels dans les 12 derniers mois ainsi que la fréquence des rapports dans les 4 dernières semaines « ont diminué au fil du temps », pour les deux sexes et dans tous les groupes d’âge. « En 1992, 86,4 % des femmes âgées de 18 à 69 ans avaient eu des rapports sexuels au cours de l’année écoulée ; cette proportion est passée à 82,9 % en 2006 et à 77,2 % en 2023. De même, le pourcentage d’hommes ayant eu des rapports sexuels dans l’année est passé de 92,1 % en 1992 à 89,1 % en 2006 et 81,6 % en 2023 ». Cette baisse est cependant beaucoup moins marquée chez les personnes qui vivent en couple. Et elle est souvent bien vécue par les femmes, notamment les plus jeunes et les plus âgées.
L’enquête montre d’ailleurs que la vie sexuelle se prolonge aux âges avancés (pour les populations qui ne résident pas à l’Ephad) : 56,6 % des femmes et 73,8 % des hommes restent actifs sexuellement entre 50 et 89 ans.
Globalement, les Français interrogés se déclarent satisfaits de leur sexualité (45,3 % des femmes et 39 % des hommes). « La satisfaction sexuelle est plus élevée aujourd’hui, à tous les âges, qu’elle ne l’était en 2006 pour les deux sexes, sauf entre 30 et 39 ans pour les femmes et après 60 ans pour les hommes », précisent toutefois les auteurs. « Le discours consistant à dire que l’égalité entre les sexes et le féminisme déstabilisent les hommes dans leur sexualité n’est pas ce que montre l’enquête », ajoute Nathalie Bajos.
L’étude dresse toutefoisun tableau inquiétant des violences sexuelles. En 2023, 29,8 % de femmes de 18-69 ans ont déclaré avoir subi un rapport forcé ou une tentative de rapport forcé, contre 15,9 % en 2006. Chez les hommes, les chiffres passent de 4,6 % à 8,7 %. « Ces évolutions peuvent traduire à la fois une augmentation de la capacité à qualifier les faits de violence et une augmentation de la fréquence de tels événements, mais aussi une plus grande facilité à les évoquer dans le cadre d’une recherche », observent les auteurs. Fait notable : la hausse des déclarations de violences est particulièrement marquée chez les 18-29 ans.
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