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Histoire des cathédrales en France

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Cathédrale Saint-Pierre d'Angoulême.
Cathédrale Notre-Dame d'Amiens (XIIIe siècle).
Cathédrale Notre-Dame-et-Saint-Vaast d'Arras (XVIIIe siècle).

Cet article retrace l'histoire des cathédrales en France.


C'est en 1173 que l’évêque Guillaume entreprend la fortification du bâtiment sur les fondations d'une ancienne église romane du ve siècle, construite sur l'emplacement d'un ancien temple grec dédié à Diane. La cathédrale présente l'un des plus beaux exemples d'église romane fortifiée de la région.

Des abbayes aux cathédrales

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Cathédrale Saint-Étienne de Toul.

Ce que les abbayes font durant le XIe siècle, les évêques n'en ont ni les ressources, ni le pouvoir.

Jusqu'à la fin du XIIe siècle, les cathédrales n'ont pas les dimensions que nous leur connaissons aujourd'hui : nombre d'églises abbatiales sont des constructions beaucoup plus grandes (cf. Cluny dont la longueur est supérieure à celle de la basilique actuelle de Saint-Pierre de Rome). Jusque-là, le morcellement féodal constitue un obstacle à la constitution civile des populations ; l'influence des évêques est limitée par ces grands établissements religieux du XIe siècle. Les abbayes menées par des abbés à forte personnalité, constituent par contre des centres d'attraction où se combinent richesse et pouvoir, intelligence et activité. Les abbayes sont des propriétaires puissants, protégés par les papes et jouissent de privilèges étendus qui les assimilent quasiment à des seigneurs féodaux. Leur influence est considérable du fait de leur participation très active à l'éducation de la jeunesse et à toutes les décisions politiques.

Lorsque les populations urbaines, instruites, enrichies, laissent paraître les premiers symptômes d'émancipation et s'érigent en communes, se produit une réaction contre la féodalité monastique et séculière. Les évêques, appuyés par la monarchie, vont profiter de ce mouvement : l'instant est propice pour reconquérir le pouvoir et l'influence qui leur revient normalement au sein de l'Église, alors qu'ils s'étaient concentrés dans les établissements religieux.

Parfois, les collégiales sont titrées cathédrales sans reconstruction notable. C'est le cas de la cathédrale Saint-Dié de Saint-Dié-des-Vosges, vaste édifice roman dont seule la façade fut reconstruite au XVIIIe siècle, avant que de devenir siège d'un évêché en 1777.

Le Moyen Âge, âge d'or des cathédrales

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La majorité des cathédrales a été érigée entre 800 et 1600. Ainsi la construction de la cathédrale Notre-Dame de Paris a débuté en 1163 par les mains du Pape Alexandre III pour enfin se terminer en 1345 (ou 1351, tout dépend des sites historiques), celle de la cathédrale Notre-Dame de Reims en 1211.

En dehors de cette période, quelques cathédrales furent construites ou reconstruites comme par exemple :

Le temps des premières cathédrales

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Seule l'archéologie nous permet de connaître l’existence de cathédrales antérieures au XIe siècle. Une exception notable cependant, une partie de la nef de l'ancienne cathédrale carolingienne de Beauvais subsiste aujourd'hui

Les cathédrales romanes

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Cathédrale Notre-Dame d'Embrun.

En France, beaucoup des cathédrales romanes ont disparu, remplacées par les cathédrales gothiques. Mais subsistent tout de même encore aujourd'hui : la cathédrale Saint-Étienne d'Agde, la cathédrale Saint-Pierre d'Angoulême, la cathédrale Notre-Dame-et-Saint-Véran de Cavaillon, la cathédrale Notre-Dame-du-Bourg de Digne, la cathédrale Sainte-Eulalie-et-Sainte-Julie d'Elne, la cathédrale Notre-Dame d'Embrun, la cathédrale Notre-Dame-du-Puy de Grasse, la cathédrale Notre-Dame-de-l'Assomption de Lescar, la cathédrale Notre-Dame-de-Nazareth d'Orange, l'ancienne cathédrale Saint-Étienne de Périgueux, la cathédrale Saint-Front de Périgueux, la cathédrale Saint-Pons de Saint-Pons-de-Thomières, la cathédrale Notre-Dame-de-l'Assomption de Senez, la cathédrale Notre-Dame-des-Pommiers de Sisteron, la cathédrale de Vaison-la-Romaine, la cathédrale Saint-Pierre-et-Saint-Paul de Villeneuve-lès-Maguelone, auxquelles on peut ajouter l'ancienne cathédrale Saint-Trophime d'Arles

L'essor au XIIe siècle et première moitié du XIIIe siècle

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Dans la seconde moitié du XIIe et au XIIIe siècle, l'épiscopat se renforce et entreprend de reconstruire ses cathédrales. La relative prospérité de l'économie et des finances royales, et l'appui fort de souverains — comme Philippe-Auguste, Louis VIII et Saint Louis — forment un contexte favorable à ce projet (ce qui explique, pour l'essentiel, que les cathédrales sont construites sur le domaine royal). Le concours énergique des populations et l'activité développée par les établissements religieux allait lui venir en aide.

Il est difficile aujourd'hui de donner une idée de l'empressement avec lequel les populations urbaines se mirent à élever des cathédrales. La foi avait certes son importance, mais il s'y joignait un instinct très juste d'unité et de constitution civile. Plus que de la cité, la cathédrale était pour André Vauchez la « fille des moissons » puisqu'elle était financée pour l'essentiel par le prélèvement agricole de l'évêque et du chapitre[1].

Selon le médiéviste Florian Mazel, la réforme grégorienne (de la seconde moitié du XIe siècle au début du XIIIe siècle) a entraîné l'autonomie des évêques vis-à-vis des seigneurs laïcs et leur enrichissement ainsi que celui des chapitres cathédraux, grâce à la dîme ou d'autres taxes. Cela a permis la relance des grands chantiers de rénovation ou de reconstruction des cathédrales[2].

L'essoufflement du mouvement

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L'autorité royale limite les ambitions du clergé

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Cathédrale Sainte-Cécile d'Albi.

L'alliance du clergé avec la monarchie ne tarde pas à inquiéter les barons ; saint Louis reconnait bientôt que le pouvoir royal ne fait que changer de maître. En 1235, la noblesse de France et le roi s'assemblent à Saint-Denis pour limiter la puissance que les tribunaux ecclésiastiques s'étaient arrogée.

En 1246, les barons rédigent un pacte d'union et nomment une commission des quatre plus puissants d'entre eux, pour décider dans quels cas le baronnage doit prendre fait et cause pour tout seigneur vexé par le clergé. De plus, chaque seigneur s'engage à mettre en commun la centième partie de son revenu, afin de poursuivre activement le but de l'union.

Au milieu de ces dangers, par sa conduite à la fois ferme et prudente, le roi parvient à contenir les prétentions du clergé dans des limites favorables à son pouvoir, et faire prévaloir l'autorité monarchique sur la féodalité. Dès lors, le rythme des constructions se ralentit : les édifices commencés sont achevés à la hâte, et ceux qui sont lancés le sont à moins vaste échelle. Les quelques études des comptes montrent que les réserves dont disposent les évêques se sont épuisées, souvent en rachat d'immeubles autour des anciennes cathédrales, et/ou dans le début de la construction de l'église. Les projets s'essoufflent ou ralentissent dans la mesure où ils ne sont plus alimentés que par des dons annuels ou les excédents dégagés par les ressources du domaine de l'évêque.

Ralentissement des campagnes de construction dans la seconde moitié du XIIIe siècle

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Les chantiers de ces vastes constructions tardivement sorties de terre n'arrivent pas à leur développement final ; ils s'arrêtent tout à coup ; si les cathédrales sont achevées, c'est au prix d'efforts personnels d'évêques ou de chapitres qui emploient leurs propres biens pour terminer ce que la Foi et la fougue de toute une population avaient entrepris. Rares sont les cathédrales qui ont été achevées telles qu'elles avaient été projetées.

Cela se comprend : la période pendant laquelle leur existence est pour ainsi dire un besoin impérieux, l'expression d'un désir irrésistible, correspond à une durée d'environ soixante ans, comprise entre les années 1180 et 1240. Ce qui surprend aujourd'hui, c'est qu'en un temps aussi court on ait pu obtenir, sur un territoire aussi vaste, des résultats aussi surprenants ; car ce n'était pas seulement des manœuvres qu'il fallait trouver, mais des milliers d'artistes qui, la plupart, étaient des hommes dont le talent dans l'exécution des œuvres est pour nous aujourd'hui un sujet d'admiration.

Cathédrale Notre-Dame de Strasbourg.
  • À la mort de Philippe-Auguste, en 1223, les diocèses bâtisseurs sont compris dans le domaine royal : Beaucoup ont rebâti leurs cathédrales initiales. Les constructions sont fort avancées même si beaucoup restent inachevées.
  • Si certains diocèses sont politiquement unis au domaine royal, et s'en reconnaissent vassaux, leurs cathédrales s'élèvent rapidement sur des plans nouveaux, comme celles de la France ; les diocèses de Reims, de Châlons, de Troyes en Champagne, sont les premiers à suivre le mouvement. En Bourgogne, ceux d'Auxerre et de Nevers, les plus rapprochés du domaine royal, reconstruisent leurs cathédrales ; ceux d'Autun et de Langres, plus éloignés, conservent leurs anciennes églises élevées vers le milieu du XIIe siècle.
  • Dans la Guyenne, restée anglaise, excepté Bordeaux qui tente un effort vers 1225, Périgueux, Angoulême, Limoges, Tulle, Cahors, Agen, gardent leurs vieux monuments.
  • En dehors du domaine royal, le mouvement n'existe pas, et ce n'est que plus tard, vers la fin du XIIIe siècle, lorsque la monarchie eut à peu près réuni toutes les provinces des Gaules à la Couronne, que l'on entreprend la reconstruction des cathédrales. C'est alors que quelques diocèses remplacent leurs vieux monuments par des constructions neuves élevées sur des plans sortis du domaine royal. Mais ce mouvement est restreint, timide, et il s'arrête bientôt par suite des difficultés politiques du XIVe siècle.
  • À la mort de Philippe le Bel, en 1314 - soit près d'un siècle plus tard- le domaine royal s'est étendu : il englobe la Champagne, le Languedoc, le marquisat de Provence, l'Auvergne et la Bourgogne. Les provinces anglaises, la Bretagne et la Provence, seules, résistent. À la mort de Charles V, en 1380, les Anglais ne possèdent plus que Bordeaux, le Cotentin et Calais.
Montpellier (cathédrale Saint-Pierre de Montpellier en 1364), Carcassonne, Narbonne, Lyon, exécutent dans leurs cathédrales des travaux considérables et tentent de les renouveler. Clermont en Auvergne, cherche à suivre l'exemple.
  • Mais l'élan formidable du XIIe/XIIIe s. semble épuisé : les cathédrales dont la reconstruction n'a pas été commencée pendant le XIIIe siècle demeurent ce qu'elles sont ; celles restées inachevées se terminent avec peine[3].
Le mouvement continue, de manière plus lente, alors que les styles utilisés se diversifient : cathédrale Saint-Pierre de Rennes (1490), cathédrale Sainte-Marie d'Auch (1489)

Liste de cathédrales avec mention de la date présumée de début des travaux

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Cathédrale Notre-Dame de Chartres.
Basilique Saint-Denis.
Cathédrale Notre-Dame de Rouen.
Cathédrale Saint-Just-et-Saint-Pasteur de Narbonne.

La construction de cathédrales à l'époque moderne

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La fin de travaux déjà engagés au Moyen Âge

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Certaines cathédrales inachevées au Moyen Âge ont connu une reprise des travaux au XVIe siècle comme la cathédrale Saint-Pierre de Beauvais, de Metz (transept et chœur) ou la cathédrale Notre-Dame d'Évreux par exemple. La cathédrale Saint-Maclou de Pontoise et la cathédrale Notre-Dame du Havre furent elles aussi en grande partie reconstruites au XVIe siècle en style Renaissance.

Les cathédrales des XVIIe et XVIIIe siècles

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Cathédrale de Montauban.

La construction d'un certain nombre de cathédrales fut entreprise après la révocation de l'édit de Nantes, en 1685. L'Église, encouragée par le pouvoir royal, entendait affirmer sa présence en terre jusque-là protestante. Ce fut le cas à La Rochelle et à Montauban.

D'autres constructions furent engagées pour remplacer un édifice ruiné comme à Rennes, Dax ou à Langres pour la façade. La création du diocèse de Nancy, en 1777 fit de la primatiale de Lorraine, la cathédrale de Nancy. Les cathédrales actuelles d'Arras et de Cambrai n'accédèrent à cette dignité que par la destruction des anciennes cathédrales vendues comme biens nationaux à la Révolution française.

Époque contemporaine, la fin de la construction de cathédrales ?

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Cathédrale de Marseille.

Les cathédrales du XIXe siècle

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Quelques cathédrales furent reconstruites au cours du XIXe siècle comme la cathédrale de Belley, la cathédrale de Gap ou la cathédrale de Lille en style néogothique ; la cathédrale de Moulins étant agrandie, en style néogothique également. La cathédrale Sainte-Marie-Majeure de Marseille, quant à elle, fut reconstruite en style néo-byzantin dans la seconde moitié du XIXe siècle. La cathédrale Saint-Charles-Borromée de Saint-Étienne de style néogothique a été construite de 1912 à 1923.

Les cathédrales des XXe et XXIe siècles

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Dans les années 1960, la création de nouveaux diocèses dans la région parisienne a entraîné l'élévation au rang de cathédrale d'édifices construits dans l'entre-deux-guerres comme la cathédrale de Nanterre, la cathédrale d'Evry construite à la toute fin du XXe siècle et la cathédrale de Créteil inaugurée en 2015.

Notes et références

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Références

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  1. Pierre Nora, Les Lieux de mémoire, Gallimard, , p. 106.
  2. Florian Mazel, « L'Église et le nouvel ordre du monde », L'Histoire, n° 507, mai 2023
  3. Source : Eugène Viollet-le-Duc, Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle, 10 vol., Paris, B. Bance, A. Morel, 1854 à 1868, Paris, Ernest Gründ Editeur 9, rue Mazarine Paris, Imprimerie (ass. ouvr.), 11 rue Cadet, J. Amilcar, directeur, 1061-24 *Tome premier ABA-ARO : 507 pages; Tome deuxième ART-CHA : 546 pages; Tome troisième CHA-CON : 515 pages; Tome quatrième CON-CYB : 509 pages; Tome cinquième DAI-FUT : 566 pages; *Tome sixième GAB-OUV : 458 pages; Tome septième PAL-PUIT : 571 pages; Tome huitième QUAI-SYN : 524 pages; Tome neuvième TAB-ZOD : 554 pages; Tome dixième Table analytique des mots contenus dans les 9 volumes

Articles connexes

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Bibliographie

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  • Michel Florisoone, Dictionnaire des cathédrales de France, Paris, Librairie Larousse, 1971
  • Pascal Tonazzi, Florilège de Notre-Dame de Paris, Éditions Arléa, Paris, 2007, (ISBN 2 - 86 959 - 795 - 9)
  • Mathieu Lours, Dictionnaire des cathédrales, Éditions Gisserot, Paris, 2008
  • Eugène Viollet-le-Duc, Histoire d'un hôtel de ville et d'une cathédrale, Paris, 1878, réédition, Paris, Berger-Levrault, 1978 (ISBN 2 - 7 013 - 0227 - 7)
  • François Icher, Les Œuvriers des cathédrales, Éditions de La Martinière, 1998

Liens externes

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