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« Logique de Port-Royal » : différence entre les versions

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{{À sourcer|date=mars 2009}}
{{Infobox Ouvrage}}


La '''''Logique de Port-Royal''''' est le nom habituellement donné à l'ouvrage d'[[Antoine Arnauld (1612-1694)|Antoine Arnauld]] et [[Pierre Nicole]], intitulé ''La Logique ou l'art de penser'' et publié pour la première fois en [[1662 en littérature|1662]], à [[Paris]] sans nom d’auteur. On l'appelle ''Logique de Port-Royal'', bien qu'aucune mention de la fameuse abbaye ne soit portée sur son titre, ce qui peut notamment servir à éviter de confondre cette œuvre avec celle de [[Étienne Bonnot de Condillac|Condillac]] parue à la fin du {{s-|XVIII}} sous un titre assez semblable (''La logique ou les premiers développements de l'art de penser'', 1781).
'''L'abbaye de Port-Royal''' de [[Paris]] ne doit pas être confondue avec l'abbaye de [[Port-Royal-des-Champs]] dans la [[vallée de Chevreuse]]. La première fut construite, à Paris, à partir de [[1626]], pour décongestionner la maison mère de [[Magny-les-Hameaux]] dans la vallée de Chevreuse, [[Port-Royal-des-Champs]].


== Le contexte janséniste de Port-Royal ==
Fermée en [[1790]], au début de la [[Révolution française|Révolution]], elle servit de prison dès [[1793]] sous le nom de prison de Port-libre ou de la Bourbe. [[Chrétien Guillaume de Lamoignon de Malesherbes]] (avocat de [[Louis XVI]] à son procès) et Madame de Tourzel, ancienne gouvernante des enfants de France, y furent détenus.
{{loupe|Jansénisme}}
[[Port-Royal des Champs|Port-Royal]] était le centre spirituel du [[jansénisme]]. Mais ce fut aussi un lieu de réunion où de grands [[écrivain]]s et [[philosophe]]s comme [[Blaise Pascal]] pratiquaient leurs études sur la [[logique]], la [[grammaire]], la [[théologie]] et la [[traduction]] des textes de [[religion]] [[chrétienne]], notamment à partir du [[Grec ancien|grec]] et de l’[[hébreu]].


En [[1660]], les grammairiens de Port Royal, [[Antoine Arnauld (1612-1694)|Antoine Arnauld]] et [[Claude Lancelot]], avaient publié une [[grammaire]] fondée non sur la conformité à l’usage jugé le meilleur, mais sur la [[raison]]. Cet ouvrage, connu aujourd'hui sous le nom de ''Grammaire de Port-Royal'', portait le titre complexe ''[[Grammaire générale et raisonnée contenant les fondemens de l'art de parler, expliqués d'une manière claire et naturelle]]'', « générale » parce qu'elle s'occupe du [[langage]] en général, et non d'une [[langue]] particulière, et « raisonnée » parce qu’elle explique le fonctionnement du [[langage]] à travers la [[raison]]. Il peut être considéré comme l’antithèse du « bon usage » prôné dans le ''Remarques sur la langue française'' de [[Claude Favre de Vaugelas|Vaugelas]].
== Travaux en [[logique]] et relations avec la [[linguistique]] ==


Soutenant que chaque [[langue]] exprimerait dans son propre système des [[mécanisme (philosophie)|mécanismes]] [[logique]]s [[Universalisme (philosophie)|universels]], la Grammaire de Port-Royal marqua profondément la naissance de la [[linguistique]] moderne, en particulier du [[Linguistique générative|courant chomskyen]]. Tout comme ce dernier, elle postule en effet l'existence d'une [[grammaire universelle]].
L’abbaye de Port-Royal était un [[couvent]] de femmes et au [[XVIIe siècle]] un haut-lieu du [[jansénisme]].


La Grammaire de Port Royal s'inscrivait dans le cadre varié des travaux entrepris à Port-Royal, où fut notamment élaborée une nouvelle [[Traduction de la Bible en français|traduction de la Bible]], dite « de Port-Royal ». [[Blaise Pascal|Pascal]], [[Robert Arnauld d'Andilly]], [[Pierre Nicole|Nicole]] et [[Pierre Thomas du Fossé]] y ont travaillé, sous la direction de [[Louis-Isaac Lemaistre de Sacy|Louis-Isaac Lemaître de Sacy]]. Selon le commentateur [[Philippe Sellier]], ce serait « la plus belle [traduction de la Bible] jamais réalisée en France » {{refnec}}. Cette édition s'y est élaborée entre [[1657]] et [[1696]]. Son style a influencé la création littéraire de grands écrivains français, tels que [[Voltaire]], [[Victor Hugo]], [[Gustave Flaubert|Flaubert]], et [[Arthur Rimbaud]].
C'était un lieu de réunion où de grands [[écrivain]]s et [[philosophe]]s comme [[Blaise Pascal]], pratiquaient leurs études sur la [[logique]], la [[grammaire]], la [[théologie]] et la [[traduction]] des textes de [[religion]] [[chrétienne]], notamment à partir du '''[[Grec ancien|grec]]''' et de l’'''[[hébreu]]'''.


== La Logique de Port-Royal ==
[[Blaise Pascal]] avait rejoint le courant [[janséniste]] et, en [[1656]], il écrivit un pamphlet, ''[[les Provinciales]]'', contre la [[scolastique]].


C'est aussi dans ce contexte qu'a été écrite ''La logique de Port Royal'' qui sera jusqu'au milieu du {{s-|XIX}} une référence centrale dans les domaines de la [[philosophie du langage]]. Arnauld et Nicole y élaborent une théorie classique du [[Signe linguistique|signe]] et de la [[représentation]]<ref>Voir brève présentation d'un extrait de la ''Logique'' par Pascal Ludwig, dans l'anthologie ''Le langage'', GF Corpus, Paris, Flammarion, 1997.</ref>. Selon leur conception, le langage a une fonction d'expression de la [[pensée]] via les mots, qui sont les signes des pensées, et les écrits qui sont les signes des mots<ref name="L14" />. La conception du signe de Port-Royal est aussi frappante en ce que, si elle opère une typologie des différents signes, elle embrasse aussi bien les [[signes linguistiques]], c'est-à-dire les paroles ou les écrits, que les signes dits « naturels » (la fumée est le signe du feu) ou encore les signes [[théologie|théologiques]] (le pain est le signe, dans l'[[eucharistie]], du corps du Christ)<ref name="L14" />. Logique, langage, épistémologie et théologie sont ainsi intrinsèquement liés dans cet ouvrage, sorte de compendium de l’[[épistémologie]] [[René Descartes|cartésienne]] et de [[Blaise Pascal|Pascal, structuré selon les quatre aspects de la pensée rationnelle]] : [[compréhension|comprendre]], juger, déduire, ordonner {{refnec}} <!-- il semble que la thèse de Louis Marin soit précisément de distinguer l'approche pascalienne et l'approche de cet ouvrage -->,
En [[1660]], les grammairiens de Port Royal, [[Antoine Arnauld]] et [[Claude Lancelot]], tous deux [[janséniste]]s, conçurent une [[grammaire]] fondée non sur la conformité à l’[[usage]] jugé le meilleur, mais sur la [[raison]]. Cet ouvrage prit le nom de ''Grammaire générale et raisonnée'', générale parce qu'elle va s’occuper de toutes les [[langue]]s, et raisonnée parce qu’elle explique le fonctionnement de la [[langue]] à travers la [[raison]]. Elle peut être considérée comme l’antithèse du bon usage de [[Vaugelas]].


Toutes nos connaissances ont lieu à travers des [[idée]]s qui reflètent les choses {{refnec}}, et le jugement porté sur ces choses s’exprime dans des [[propositions grammaticales]] constituées par un [[sujet]] et un [[Prédicat (linguistique)|prédicat]] {{refnec}}. La validité des propositions obtenues par déduction dépend du respect des règles [[syllogisme|syllogistiques]]. Enfin, l’ordonnancement des jugements et conclusions conduit à la science par le biais de la {{page h'|méthode}} ([[analyse (philosophie)|analyse]] et [[synthèse]]) {{refnec}}.
Croyant à l’existence de [[mécanisme (philosophie)|mécanismes]] [[logique]]s [[universel]]s que chaque [[langue]] exprime dans son propre système, elle marqua profondément la naissance de la [[linguistique]] moderne.


C'est aussi une étude du raisonnement passionnel :
Cet ouvrage en grammaire et [[linguistique]] s'inscrivit dans un cadre beaucoup plus large de travaux sur la [[logique]] générale.
{{Citation bloc|Si on examine avec soin ce qui attache ordinairement les hommes plutôt à une opinion qu'à une autre, on trouvera que ce n'est pas la pénétration de la vérité et la force des raisons, mais quelque lien d'amour-propre, d'intérêt ou de passion. C'est le poids qui emporte la balance. (...) Nous jugeons les choses, non par ce qu'elles sont en elles-mêmes, mais par ce qu'elles sont à notre égard ; et la vérité et l'utilité ne sont pour nous qu'une même chose.|''Logique de Port-Royal'', III, ch. xx, p. 261}}


== La théorie des signes ==
« '''La logique de Port-Royal''' » a été publiée pour la première fois en [[1662]], à [[Paris]] et sans nom d’auteur. Elle est l'œuvre d'[[Antoine Arnauld]] et [[Pierre Nicole]]. À la fois grammaire intellectuelle et compendium de l’épistémologie de la philosophie de [[René Descartes|Descartes]] et de [[Blaise Pascal|Pascal]], cet ouvrage est structuré selon les quatre aspects de la pensée rationnelle : comprendre, juger, déduire, ordonner.


La ''Logique'' élabore, au chapitre IV de la première partie, une théorie du [[signe]] en tant que dédoublement entre la chose représentée et la chose qui représente : {{citation bloc|Quand on considère un objet en lui-même et dans son propre être, sans porter la vue de l’esprit à ce qu’il peut représenter, l’[[idée]] qu’on en a est une idée de chose, comme l’idée de la terre, du soleil ; mais quand on ne regarde un certain objet que comme en représentant un autre, l’idée qu’on en a est une idée de signe, et ce premier objet s’appelle ''[[wikt:signe|signe]]''. C’est ainsi qu’on regarde d’ordinaire les cartes et les tableaux. Ainsi le signe renferme deux idées : l'une de la chose qui représente ; l'autre de la chose représentée ; & sa nature consiste à exciter la seconde par la première<ref name="L14">''Logique ou l'art de penser'', I, 4. Extrait dans l'anthologie éditée par Pascal Ludwig, ''op.cit.''. et page 46 de l'édition Tel-Gallimard, 1992 pour la première référence</ref>.}}.
Toutes nos connaissances ont lieu à travers des idées qui reflètent les choses, et le jugement porté sur ces choses s’exprime dans des propositions constituées par un [[sujet]] et un prédicat. La justesse des propositions est examinée, lors de la [[déduction]], sur la base du [[syllogisme]]. Enfin, l’ordonnancement des jugements et conclusions conduit à la science par le biais de la [[Histoire de la méthode|méthode]] (analyse et synthèse).
Or, la chose qui représente (le [[Signifié et signifiant|signifiant]] en termes modernes) peut toujours s'opacifier, et devenir lui-même chose : ainsi, on peut regarder un tableau ou une carte en tant que signe représentant quelque chose, ou on peut inspecter la matière brute du tableau ou de la carte, sans penser à ce à quoi ils renvoient<ref name=L14/>. {{citation|Car la même chose pouvant être en même temps & chose & signe, peut cacher comme chose, ce qu'elle découvre comme signe. Ainsi la cendre chaude cache le feu comme chose, & le découvre comme signe.}}<ref name=L14/>.
Cette [[logique]] a voulu s’appuyer exclusivement sur les [[mathématiques]] dont elle pensait pouvoir transposer le [[modèle]] dans tous les autres domaines du [[savoir]] et de l’exercice de la [[raison]], par conséquent aussi sur le terrain de la formation [[syntaxique]] et [[grammaticale]] de tous les énoncés du [[langage]], proposant ainsi un idéal de [[langage]] [[rationnel]] qui voulait concilier l’esprit de finesse et l’esprit de géométrie : le [[discours]] classique par excellence.


[[François Recanati]] (1979) explique cette théorie par le biais de la métaphore du reflet dans la vitre ou le miroir :
De grands écrivains de cette abbaye, [[Blaise Pascal]], [[Robert Arnauld d'Andilly]], [[Pierre Nicole]], [[Pierre Thomas du Fossé]], sous la coupole du maître d'œuvre [[Louis-Isaac Lemaître de Sacy]] ont participé à la [[traduction]] de la [[Bible]], traduction dite ''du Port-Royal'' : ''« la plus belle jamais réalisée en France »'' (Philippe Sollier). Cette édition s'y est élaborée entre [[1657]] et [[1696]]. Son style a influencé la création littéraire de grands écrivains français, tels que [[Voltaire]], [[Victor Hugo]], [[Flaubert]], [[Arthur Rimbaud]]...
{{Citation bloc|Le signe est comme un miroir qui donne à voir autre chose que lui-même, ou bien encore il est comme une vitre transparente qui laisse voir autre chose qu'elle-même. Mais aussi bien le miroir que la vitre ont la propriété de s'opacifier, c'est-à-dire qu'ils peuvent cesser de se dérober pour au contraire s'offrir à la considération, à la vue de l'esprit<ref>[[François Recanati|François Récanati]], ''La Transparence et l'Enonciation'', Paris, Seuil, 1979, p.33. Cité par Pascal Ludwig, ''op.cit.''</ref>.}}


Les logiciens élaborent en outre une typologie des signes. Ils distinguent par exemple entre les « signes certains », ''[[techmêria]]'' (en grec), {{citation|comme la respiration l'est de la vie des animaux}}<ref name=L14/>, et les signes « [[probabilité|probables]] », ''[[sêmeia]]'' (en grec), {{citation|comme la pâleur n'est qu'un signe probable de grossesse}}<ref name=L14/>. La plupart des erreurs, disent-ils, proviennent d'une confusion entre ces deux espèces de signes, {{citation|& que l'on attribue un effet à une certaine [[causalité|cause]], quoiqu'il puisse aussi naître d'autres causes, & qu'ainsi il ne soit qu'un signe probable de cette cause}}<ref name=L14/>. Aussi, la théorie du signe est liée à la [[philosophie de la connaissance]] et à la conception du [[principe de causalité]] : l'effet est comme le signe de la cause.
Voir : [[Traduction de la Bible en français]] (paragraphe {{s|XVII|e}}).


Une autre {{citation|division des signes}} concerne les « signes naturels » (l'image dans le [[miroir]] est le signe naturel de celui qu'elle représente<ref name=L14/>) d'un côté, et les signes {{citation|d'institution et d'établissement}}<ref name=L14/> ([[conventionnalisme|conventionnels]] en termes modernes), tels que les [[mot]]s, qui {{citation|sont signes d'institution des pensées, & les caractères des mots.}}<ref name=L14/>.
== Influence sur les sciences sociales en général ==


Enfin, cette théorie du signe n'est pas qu'[[épistémologique]], mais contient aussi des résonances [[théologique]]s : {{citation|les [[symbole]]s [[eucharistie|Eucharistiques]] cachent le corps de JÉSUS-CHRIST <!-- les majuscules de même que les & sont du texte lui-même --> comme chose, & le découvrent comme symbole.}}<ref name=L14/>
Le philosophe [[Michel Foucault]], dans ''Les Mots et les Choses'', estime que la logique de Port-Royal a contribué, avec d'autres œuvres, à façonner une nouvelle [[représentation]], qu'il appelle [[épistémè]] (conception du [[monde (univers)|monde]]). Cette représentation s'est mise en place en deux étapes :
* au milieu du {{s|XVII|e}}
* dans les années [[1775]]-[[1825]].
Voir aussi [[idéologie]].
<!-- Suggestion de présentation des annexes. Aide : http://fr.wikipedia.org/wiki/Aide:Notes et références -->


== Notes et références de l'article ==
== Interprétations de la Logique de Port-Royal ==
<references/>


[[Louis Marin (philosophe)|Louis Marin]] a beaucoup travaillé sur la ''Logique ou l'art de penser'', dans différents ouvrages (dont ''Utopiques : jeux d'espaces'', 1973). Dans sa thèse, ''La Critique du discours'', il analyse de façon croisée la ''Logique'' et les [[Pensées de Pascal|''Pensées'' de Pascal]], affirmant que ce dernier mène une critique interne au jansénisme de Port-Royal de la théorie du signe explicitée dans la ''Logique''.
== Voir aussi ==
=== Articles connexes ===
* [[Jansénisme]]
* [[Liste d'abbayes cisterciennes de France]]
* [[Liste des abbayes et monastères]]


Le philosophe [[Michel Foucault]], dans ''[[Les Mots et les Choses]]''<ref>Michel Foucault, ''Les mots et les choses'', Gallimard, Paris, 1966, {{p.|70, 75 et 79}}</ref>, estime que la logique de Port-Royal a contribué, avec d'autres œuvres, à façonner une nouvelle [[représentation]], qu'il appelle [[épistémè]] (conception du [[monde (univers)|monde]]). Cette représentation s'est mise en place en deux étapes :
=== Liens et documents externes ===
* au milieu du {{XVIIe siècle}}
'''Cinéma'''
* dans les années [[1775]]-[[1825]].
* [[2006 au cinéma|2006]] : ''[[Fragments sur la grâce]]'' de [[Vincent Dieutre]]


== Restrictions de cette logique ==
'''Sites internet'''
Cette logique relève du [[calcul des prédicats]] mais n'utilise quasiment que des prédicats unaires ; elle relève donc seulement de la [[logique monadique du premier ordre]].
* Télécharger sur [[Gallica]] la [http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k83926h.capture Logique de Port-Royal]

* [http://artelio.org/art.php3?id_article=1109/ Abbaye Port-Royal de Paris]
Parmi les règles usuelles du calcul des prédicats, élaboré au début de {{s-|XX}}, qui ne sont pas utilisées par la logique de Port-Royal, figure la règle : Si tout objet a une certaine propriété, alors il existe au moins un objet qui a cette propriété.
* [http://www.amisdeportroyal.org/portroyal/ Société des Amis de Port-Royal]
Cette règle contemporaine est conventionnelle et simplifie les raisonnements, elle implique que tout domaine d'objets considéré est non vide. Une telle convention n'était pas appliquée par la logique de Port-Royal.

== Bibliographie ==
* Antoine Arnauld et Pierre Nicole, ''La logique ou l’art de penser'', édition critique par Pierre Clair et François Girbal, Paris : Librairie philosophique J. Vrin, 1981.
*Antoine Arnauld et Pierre Nicole, ''La logique ou l’art de penser'', Paris : Editions Gallimard, 1992.
*Antoine Arnauld et Pierre Nicole, ''La logique ou l’art de penser (dite Logique de Port-Royal)'', édition critique par Dominique Descotes, Paris : Champion, 2011.
* [[Joël Biard]], « La sémiologie de Port-Royal. Signes, idées, langages », ''[[Archives de philosophie]]'', 2015/1 (Tome 78), {{p.|9-28}}. DOI : 10.3917/aphi.781.0009. {{lire en ligne|lien=https://preprod.cairn.info/revue-archives-de-philosophie-2015-1-page-9.htm}}
* Joël Biard, Martine Pécharman, « Pour un Port-Royal contrasté. Sémiologie, philosophie de la connaissance et théologie », ''Archives de Philosophi''e, 2015/1 (Tome 78), {{p.|5-8}}. DOI : 10.3917/aphi.781.0005. {{lire en ligne|lien=https://preprod.cairn.info/revue-archives-de-philosophie-2015-1-page-5.htm}}
* Marc Dominicy, ''La naissance de la grammaire moderne : langage, logique et philosophie a Port-Royal'', Bruxelles : Mardaga, 1984.
* Louis Marin, ''La critique du discours : sur la "Logique de Port-Royal" et les "Pensées" de Pascal'', Paris: Les Editions de Minuit, 1975.

== Notes et références ==
{{Références|colonnes=1}}

== Articles connexes ==
{{Autres projets|wikisource = La Logique ou l’Art de penser|wikisource titre = La Logique ou l'Art de penser}}
* [[Organon]] d'[[Aristote]]
* [[Logique traditionnelle]]
* [[Grammaire de Port-Royal]]
* [[Jansénisme]]
* [[Port-Royal des Champs]]
* [[Signe linguistique]]

== Liens externes ==
* Consulter l’édition de [https://archive.org/details/lalogiqueoulart00arnagoog/page/n5/mode/1up?ref=ol&view=theater 1763] de l’ouvrage
* Télécharger le texte de la cinquième édition de 1683 dans l'édition de 1878 sur [[Gallica]] la [https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k83926h.capture Logique de Port-Royal]
* Télécharger la [https://books.google.de/books?id=fIIPAAAAQAAJ troisième édition de 1668]
* Télécharger une [https://www.pdfdrive.com/la-logique-ou-lart-de-penser-logique-de-port-royal-e179573101.html édition en format pdf document]
* [http://www.amisdeportroyal.org/societe/ Société des Amis de Port-Royal]
* [http://www.bib-port-royal.com/ Site de la Bibliothèque de Port-Royal]
* [http://www.bib-port-royal.com/ Site de la Bibliothèque de Port-Royal]


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'''Bibliographie'''
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*
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[[Catégorie:Blaise Pascal]]
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[[Catégorie:Œuvre de philosophie du langage]]
[[Catégorie:Ouvrage théologique chrétien]]
[[Catégorie:Jansénisme]]
[[Catégorie:Jansénisme]]

[[nl:Port-Royal (Parijs)]]

Dernière version du 31 décembre 2023 à 11:56

Logique de Port-Royal
Langue
Auteurs
Genre
Date de parution
Pays
Séquence

La Logique de Port-Royal est le nom habituellement donné à l'ouvrage d'Antoine Arnauld et Pierre Nicole, intitulé La Logique ou l'art de penser et publié pour la première fois en 1662, à Paris sans nom d’auteur. On l'appelle Logique de Port-Royal, bien qu'aucune mention de la fameuse abbaye ne soit portée sur son titre, ce qui peut notamment servir à éviter de confondre cette œuvre avec celle de Condillac parue à la fin du XVIIIe siècle sous un titre assez semblable (La logique ou les premiers développements de l'art de penser, 1781).

Le contexte janséniste de Port-Royal

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Port-Royal était le centre spirituel du jansénisme. Mais ce fut aussi un lieu de réunion où de grands écrivains et philosophes comme Blaise Pascal pratiquaient leurs études sur la logique, la grammaire, la théologie et la traduction des textes de religion chrétienne, notamment à partir du grec et de l’hébreu.

En 1660, les grammairiens de Port Royal, Antoine Arnauld et Claude Lancelot, avaient publié une grammaire fondée non sur la conformité à l’usage jugé le meilleur, mais sur la raison. Cet ouvrage, connu aujourd'hui sous le nom de Grammaire de Port-Royal, portait le titre complexe Grammaire générale et raisonnée contenant les fondemens de l'art de parler, expliqués d'une manière claire et naturelle, « générale » parce qu'elle s'occupe du langage en général, et non d'une langue particulière, et « raisonnée » parce qu’elle explique le fonctionnement du langage à travers la raison. Il peut être considéré comme l’antithèse du « bon usage » prôné dans le Remarques sur la langue française de Vaugelas.

Soutenant que chaque langue exprimerait dans son propre système des mécanismes logiques universels, la Grammaire de Port-Royal marqua profondément la naissance de la linguistique moderne, en particulier du courant chomskyen. Tout comme ce dernier, elle postule en effet l'existence d'une grammaire universelle.

La Grammaire de Port Royal s'inscrivait dans le cadre varié des travaux entrepris à Port-Royal, où fut notamment élaborée une nouvelle traduction de la Bible, dite « de Port-Royal ». Pascal, Robert Arnauld d'Andilly, Nicole et Pierre Thomas du Fossé y ont travaillé, sous la direction de Louis-Isaac Lemaître de Sacy. Selon le commentateur Philippe Sellier, ce serait « la plus belle [traduction de la Bible] jamais réalisée en France » [réf. nécessaire]. Cette édition s'y est élaborée entre 1657 et 1696. Son style a influencé la création littéraire de grands écrivains français, tels que Voltaire, Victor Hugo, Flaubert, et Arthur Rimbaud.

La Logique de Port-Royal

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C'est aussi dans ce contexte qu'a été écrite La logique de Port Royal qui sera jusqu'au milieu du XIXe siècle une référence centrale dans les domaines de la philosophie du langage. Arnauld et Nicole y élaborent une théorie classique du signe et de la représentation[1]. Selon leur conception, le langage a une fonction d'expression de la pensée via les mots, qui sont les signes des pensées, et les écrits qui sont les signes des mots[2]. La conception du signe de Port-Royal est aussi frappante en ce que, si elle opère une typologie des différents signes, elle embrasse aussi bien les signes linguistiques, c'est-à-dire les paroles ou les écrits, que les signes dits « naturels » (la fumée est le signe du feu) ou encore les signes théologiques (le pain est le signe, dans l'eucharistie, du corps du Christ)[2]. Logique, langage, épistémologie et théologie sont ainsi intrinsèquement liés dans cet ouvrage, sorte de compendium de l’épistémologie cartésienne et de Pascal, structuré selon les quatre aspects de la pensée rationnelle : comprendre, juger, déduire, ordonner [réf. nécessaire] ,

Toutes nos connaissances ont lieu à travers des idées qui reflètent les choses [réf. nécessaire], et le jugement porté sur ces choses s’exprime dans des propositions grammaticales constituées par un sujet et un prédicat [réf. nécessaire]. La validité des propositions obtenues par déduction dépend du respect des règles syllogistiques. Enfin, l’ordonnancement des jugements et conclusions conduit à la science par le biais de la méthode (analyse et synthèse) [réf. nécessaire].

C'est aussi une étude du raisonnement passionnel :

« Si on examine avec soin ce qui attache ordinairement les hommes plutôt à une opinion qu'à une autre, on trouvera que ce n'est pas la pénétration de la vérité et la force des raisons, mais quelque lien d'amour-propre, d'intérêt ou de passion. C'est le poids qui emporte la balance. (...) Nous jugeons les choses, non par ce qu'elles sont en elles-mêmes, mais par ce qu'elles sont à notre égard ; et la vérité et l'utilité ne sont pour nous qu'une même chose. »

— Logique de Port-Royal, III, ch. xx, p. 261

La théorie des signes

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La Logique élabore, au chapitre IV de la première partie, une théorie du signe en tant que dédoublement entre la chose représentée et la chose qui représente :

« Quand on considère un objet en lui-même et dans son propre être, sans porter la vue de l’esprit à ce qu’il peut représenter, l’idée qu’on en a est une idée de chose, comme l’idée de la terre, du soleil ; mais quand on ne regarde un certain objet que comme en représentant un autre, l’idée qu’on en a est une idée de signe, et ce premier objet s’appelle signe. C’est ainsi qu’on regarde d’ordinaire les cartes et les tableaux. Ainsi le signe renferme deux idées : l'une de la chose qui représente ; l'autre de la chose représentée ; & sa nature consiste à exciter la seconde par la première[2]. »

.

Or, la chose qui représente (le signifiant en termes modernes) peut toujours s'opacifier, et devenir lui-même chose : ainsi, on peut regarder un tableau ou une carte en tant que signe représentant quelque chose, ou on peut inspecter la matière brute du tableau ou de la carte, sans penser à ce à quoi ils renvoient[2]. « Car la même chose pouvant être en même temps & chose & signe, peut cacher comme chose, ce qu'elle découvre comme signe. Ainsi la cendre chaude cache le feu comme chose, & le découvre comme signe. »[2].

François Recanati (1979) explique cette théorie par le biais de la métaphore du reflet dans la vitre ou le miroir :

« Le signe est comme un miroir qui donne à voir autre chose que lui-même, ou bien encore il est comme une vitre transparente qui laisse voir autre chose qu'elle-même. Mais aussi bien le miroir que la vitre ont la propriété de s'opacifier, c'est-à-dire qu'ils peuvent cesser de se dérober pour au contraire s'offrir à la considération, à la vue de l'esprit[3]. »

Les logiciens élaborent en outre une typologie des signes. Ils distinguent par exemple entre les « signes certains », techmêria (en grec), « comme la respiration l'est de la vie des animaux »[2], et les signes « probables », sêmeia (en grec), « comme la pâleur n'est qu'un signe probable de grossesse »[2]. La plupart des erreurs, disent-ils, proviennent d'une confusion entre ces deux espèces de signes, « & que l'on attribue un effet à une certaine cause, quoiqu'il puisse aussi naître d'autres causes, & qu'ainsi il ne soit qu'un signe probable de cette cause »[2]. Aussi, la théorie du signe est liée à la philosophie de la connaissance et à la conception du principe de causalité : l'effet est comme le signe de la cause.

Une autre « division des signes » concerne les « signes naturels » (l'image dans le miroir est le signe naturel de celui qu'elle représente[2]) d'un côté, et les signes « d'institution et d'établissement »[2] (conventionnels en termes modernes), tels que les mots, qui « sont signes d'institution des pensées, & les caractères des mots. »[2].

Enfin, cette théorie du signe n'est pas qu'épistémologique, mais contient aussi des résonances théologiques : « les symboles Eucharistiques cachent le corps de JÉSUS-CHRIST comme chose, & le découvrent comme symbole. »[2]

Interprétations de la Logique de Port-Royal

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Louis Marin a beaucoup travaillé sur la Logique ou l'art de penser, dans différents ouvrages (dont Utopiques : jeux d'espaces, 1973). Dans sa thèse, La Critique du discours, il analyse de façon croisée la Logique et les Pensées de Pascal, affirmant que ce dernier mène une critique interne au jansénisme de Port-Royal de la théorie du signe explicitée dans la Logique.

Le philosophe Michel Foucault, dans Les Mots et les Choses[4], estime que la logique de Port-Royal a contribué, avec d'autres œuvres, à façonner une nouvelle représentation, qu'il appelle épistémè (conception du monde). Cette représentation s'est mise en place en deux étapes :

Restrictions de cette logique

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Cette logique relève du calcul des prédicats mais n'utilise quasiment que des prédicats unaires ; elle relève donc seulement de la logique monadique du premier ordre.

Parmi les règles usuelles du calcul des prédicats, élaboré au début de XXe siècle, qui ne sont pas utilisées par la logique de Port-Royal, figure la règle : Si tout objet a une certaine propriété, alors il existe au moins un objet qui a cette propriété. Cette règle contemporaine est conventionnelle et simplifie les raisonnements, elle implique que tout domaine d'objets considéré est non vide. Une telle convention n'était pas appliquée par la logique de Port-Royal.

Bibliographie

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  • Antoine Arnauld et Pierre Nicole, La logique ou l’art de penser, édition critique par Pierre Clair et François Girbal, Paris : Librairie philosophique J. Vrin, 1981.
  • Antoine Arnauld et Pierre Nicole, La logique ou l’art de penser, Paris : Editions Gallimard, 1992.
  • Antoine Arnauld et Pierre Nicole, La logique ou l’art de penser (dite Logique de Port-Royal), édition critique par Dominique Descotes, Paris : Champion, 2011.
  • Joël Biard, « La sémiologie de Port-Royal. Signes, idées, langages », Archives de philosophie, 2015/1 (Tome 78), p. 9-28. DOI : 10.3917/aphi.781.0009. [lire en ligne]
  • Joël Biard, Martine Pécharman, « Pour un Port-Royal contrasté. Sémiologie, philosophie de la connaissance et théologie », Archives de Philosophie, 2015/1 (Tome 78), p. 5-8. DOI : 10.3917/aphi.781.0005. [lire en ligne]
  • Marc Dominicy, La naissance de la grammaire moderne : langage, logique et philosophie a Port-Royal, Bruxelles : Mardaga, 1984.
  • Louis Marin, La critique du discours : sur la "Logique de Port-Royal" et les "Pensées" de Pascal, Paris: Les Editions de Minuit, 1975.

Notes et références

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  1. Voir brève présentation d'un extrait de la Logique par Pascal Ludwig, dans l'anthologie Le langage, GF Corpus, Paris, Flammarion, 1997.
  2. a b c d e f g h i j k et l Logique ou l'art de penser, I, 4. Extrait dans l'anthologie éditée par Pascal Ludwig, op.cit.. et page 46 de l'édition Tel-Gallimard, 1992 pour la première référence
  3. François Récanati, La Transparence et l'Enonciation, Paris, Seuil, 1979, p.33. Cité par Pascal Ludwig, op.cit.
  4. Michel Foucault, Les mots et les choses, Gallimard, Paris, 1966, p. 70, 75 et 79

Articles connexes

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