Photographie post-mortem
La photographie post mortem (également connue sous le nom photographie funéraire) est la pratique de photographier des personnes récemment décédées. Ces photographies de proches décédés faisaient partie de la culture américaine et européenne au XIXe siècle et au début du XXe siècle. Commandées par les familles en deuil, ces photographies les accompagnaient non seulement dans le processus de deuil, mais souvent représentaient le seul souvenir visuel du défunt et étaient parmi les biens les plus précieux de la famille[1].
Histoire
L'invention du daguerréotype en 1839 permit de démocratiser le portrait et de le rendre accessible, même aux personnes moins aisées. Avant l'invention de la photographie, l'unique moyen d'obtenir un portrait pour la postérité était de commissionner un peintre. Les méthodes photographiques développées à cette époque devenaient de moins en moins coûteuses et plus rapides.
La photographie post-mortem se développa dans les premières décennies de la photographie et devint très commune au XIXe siècle. Elle permettait aux familles de conserver au moins une photographie de la personne disparue[2]. Dès 1842, l’atelier parisien Frascari proposa des portraits à domicile de personnes décédées.
Parmi les photographies post-mortem, les photographies de nourrissons et de jeunes enfants étaient courantes[3]. Durant l'ère victorienne, le taux de mortalité infantile était extrêmement élevé
Plus tard, l'invention de la carte de visite, qui permit le tirage de plusieurs images sur le même négatif, donna la possibilité aux familles de pouvoir avoir plusieurs tirages qu'elles pouvaient par exemple envoyer aux parents du trépassé.
La photographie était aussi utilisée dans le milieu médico-judiciaire comme pour l'Affaire de Jack l'Eventreur où les victimes seront photographiées pour comprendre la fonctionnement du tueur[réf. nécessaire].
La pratique atteignit son pic de popularité vers la fin du XIXe siècle et fut en très fort déclin à partir de l'apparition de la photographie instantanée. Quelques portraits commémoratifs officiels furent encore produits au cours du XXe siècle.
Le , une semaine après la mort de François Mitterrand, Paris Match publie une photographie de l'ancien président de la République sur son lit de mort, ce qui provoque une polémique sur l'aspect moral du cliché, tout en cherchant à savoir qui est l'auteur de la photo[4],[5],[6]. L'hebdomadaire est condamné à 100 000 francs (environ 15 000 euros) pour non respect de la vie privée : « publier la photographie de la dépouille mortelle d'une personne implique la conscience de porter atteinte à l'intimité de la vie privée de celle-ci »[7]. La 17e chambre du tribunal judiciaire de Paris ajoute : « les hommes publics ne constituent pas une catégorie d'êtres à part, dont l'importance des prérogatives conduirait à la privation des droits élémentaires reconnus à tout individu »[8].
Style et mise en scène
Les premières photos post-mortem avaient pour but de créer une image du défunt qu'il n'avait pas pu faire ou avoir de son vivant. Les enfants étaient souvent représentés au repos sur un canapé ou dans un lit d'enfant, parfois avec un jouet. Il n'a pas été rare de photographier de très jeunes enfants avec un membre de la famille, le plus souvent la mère. Certaines images (en particulier les ferrotypes et ambrotypes), étaient parfois teintées pour ajouter par exemple un peu de rose aux joues du défunt.
Les photographies représentant les personnes décédées dans un cercueil ou lors des funérailles apparurent plus tard. Moins populaires aux États-Unis, elles étaient plus courantes en Europe.
La photographie post-mortem est encore pratiquée dans certaines régions du monde, comme l'Europe de l'Est.
Notes et références
- Voir sur burnsarchive.com.
- Mary Warner Marien, Photography : A Cultural History, New York, Harry N. Abrams, .
- Robert Hirsche, Seizing the Light : a Social History of Photography, New York, McGraw-Hill Higher Education, .
- [vidéo] France 3 Poitou-Charentes, « Réprobation à Jarnac suite à la publication de photos de François Mitterrand sur son lit de mort », INA,
- Ariane Chemin et Raphaëlle Bacqué, « François Mitterrand : le mystère de la dernière photo », sur Le Monde,
- Émilie Cabot, « Les mystères de la photo de Mitterrand sur son lit de mort », sur Le Journal du dimanche,
- Cécile Prieur, « "Paris-Match" condamné pour les photos de la dépouille de François Mitterrand », sur Le Monde,
- « Paris-Match condamné pour les photos de Mitterrand mort », sur Libération,
Annexes
Bibliographie
- Emmanuelle Héran (dir.), Le Dernier Portrait : [exposition], Musée d'Orsay, Paris, 5 mars-26 mai 2002, Paris, Réunion des musées nationaux, , 240 p. (ISBN 2-7118-4335-1)
- Mord, Jack. (2014). Beyond the Dark Veil: Post Mortem & Mourning Photography from The Thanatos Archive. Last Gasp Press.
- Ruby, Jay. (1995). Secure the Shadow: Death and Photography in America. Boston: MIT Press.
- Burns, Stanley B. (1990). Sleeping Beauty: Memorial Photography in America. Twelvetrees/Twin Palms Press.
- Burns, Stanley B. & Elizabeth A.(2002). Sleeping Beauty II: Grief, Bereavement in Memorial Photography American and European Traditions. Burns Archive Press.
- Orlando, Mirko. (2010). Ripartire dagli addii: uno studio sulla fotografia post-mortem. Milano: MjM editore.
- Orlando, Mirko. (2013). fotografia post mortem. Roma: Castelvecchi.
- Vidor, Gian Marco.(2013). La photographie post-mortem dans l’Italie du XIXe et XXe siècle. Une introduction. In Anne Carol & Isabelle Renaudet 'La mort à l'œuvre. Usages et représentations du cadavre dans l'art', Aix-en-Provence: Presses universitaires de Provence, 2013.
- PICKOVER C., 2016, Le Livre de la Mort et de l'Au-delà - De Thanatos à la résurrection quantique : De Thanatos à la résurrection quantique, New-York, éd. Dunod, p. 224
Articles connexes
Liens externes
- The Thanatos Archive
- The Burns Archive
- The Mourning Portrait, American Daguerrorotypes
- [vidéo] « Photographie Post-Mortem », sur YouTube, chaine Boneless Archéologie.