Aller au contenu

Liman

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Ceci est une version archivée de cette page, en date du 10 juillet 2014 à 17:18 et modifiée en dernier par Spiridon Ion Cepleanu (discuter | contributions). Elle peut contenir des erreurs, des inexactitudes ou des contenus vandalisés non présents dans la version actuelle.
Image satellite en fausses couleurs des limans de la côte Nord-Ouest de la mer Noire.

Un liman (du grec médiéval λιμάνι, limani : « abri côtier », lui-même du grec ancien λειμών, leimon : « milieu humide ») est une lagune spécifique du bas-Danube et du littoral Ouest et Nord de la mer Noire, en Bulgarie, Roumanie et Ukraine, présentant des particularités hydrologiques propres à cette zone, et dans laquelle peuvent éventuellement se verser des fleuves. Les côtes Sud et Est de la mer Noire, escarpées, ne comportent pas de « limans », à l'exception de celui de Paléostoma en Géorgie.

Détail du liman du Dniestr, à la fois lagune, delta et estuaire, débouché d'une ancienne voie commerciale entre la mer Baltique et la mer Noire et site d'un port successivement grec, romain, byzantin, génois, moldave, turc puis russe.

Spécificité

Ces lagunes saumâtres, séparées du large par des cordons littoraux sableux, servaient de frayères à poisson et de zones de nidification pour les oiseaux. Les espèces présentes dans les "limans" supportent toutes des variations de salinité et de turbidité importantes. La première connaît des pics estivaux dus à l'évaporation, la seconde des pics de printemps dus au dégel. Les "limans" étaient, avant la pollution par l'agro-industrie, d'importantes sources de poisson pour la population ; il y avait là des pêcheries traditionnelles exploitées par les Lipovènes (des russophones vieux-croyants réfugiés autour de chaque « liman ») qui conservaient le poisson (essentiellement des aloses Alosa maeotica et Alosa pontica, des mulets cabots Mugil cephalus et des esturgeons des familles Acipenser et Huso) dans des glacières en roseaux et bois, alimentées, l'hiver, par la glace de surface des « limans ».

Abrités des attaques venues de la terre ferme par d'épaisses roselières envasées, ouverts sur la mer par des passes (Στόματα/stomata, guri, boukhty) et le plus souvent navigables pour des embarcations de tirant d'eau modeste, beaucoup de "limans" ont servi, au cours des temps historiques, d'escales et de comptoirs aux colons grecs antiques, et, au Moyen Âge, aux marchands et navigateurs byzantins, varègues et génois, dans leurs échanges successivement avec les Scythes, les Daces, les Sarmates, les Bulgares, les Roumains, les Russes, les Coumans ou les Tatars. Bien qu'étant des enjeux stratégiques, les "limans" en eux-mêmes, peu propices aux batailles (si ce n'est quelques escarmouches maritimes) ont été de tout temps des abris pour les populations avoisinantes et des lieux d'échanges commerciaux et culturels. Par les "limans" transitaient du sud vers le nord les céramiques, l'or, la soie, les perles, le miel, et du nord vers le sud les fourrures, l'ambre et le bois.

Toponymie

Les « limans » avaient à l'origine[1], des noms grecs, valaques et surtout tatars (du sud-ouest vers le nord-est : Mandra, Boğaz, Αθανασίου/Athanasiou, Ανχιάλου/Anchialou, Galata, Bălțata, Șabla, Durankulak en Bulgarie, Mangalia, Dulceni, Tekir-Göl, Süt-Göl, Taș-Aul, Sinaï, Zmeïka, Golovița, Χαλμύρης/Halmyris/Iancina/Razelm/Razim/Rasim en Roumanie, Frumoasa/Kahul, Yalpuh, Çugurlu, Katlapuh, Κελλια/Kilia, Drăculia, Kunduk-Sasık, Șagani, Ali-Bey, Tuzla, Codăești, Șabolat, Akboğazi/Dniestr, Fântâna, Hacibey, Kuyalnıç, Tılihul, Kuçurğan, Yagırlık, Donuzlav, Kalmıç, Sasık, Kızıl, Kaçık, Uzunlar et Tobeçık en Ukraine - sans compter la mer d'Azov et ses propres "limans"). Au XXe siècle, une grande partie de ces noms a été « nationalisée » dans la langue de chaque pays riverain.

Notes et références

  1. Du XVe au XVIIIe siècle, lorsque la toponymie commence à être relevée, voir site du « Musée national des cartes et livres anciens » de Bucarest sur [1]

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

  • (fr) Grigore Antipa, Le Delta du Danube et la mer Noire, éd. de l'Académie roumaine, 1939.
  • (en) Neal Ascherson, Black Sea, ed. Vintage, 1996, (ISBN 0-09-959371-8).
  • (en) Petre Gâştescu, Vasile Sencu ; préface de Geo Dumitrescu, The kingdom of limans, éd. Meridiane, Bucarest, 1968.
  • (fr) Stella Ghervas, Odessa et les confins de l'Europe : un éclairage historique, in Stella Ghervas et François Rosset (dir.), Lieux d'Europe. Mythes et limites, Paris, Éditions de la Maison des sciences de l'homme, 2008, (ISBN 978-2-7351-1182-4).
  • (fr) Natalie Nougayrède, « Mer Noire : une zone de tensions géostratégiques », Le Monde, .
  • (en) Charles King, The Black Sea: A History, 2004, (ISBN 0-19-924161-9).
  • (tr) Özhan Öztürk. Karadeniz: Ansiklopedik Sözlük (Black Sea: Encyclopedic Dictionary). 2 Cilt (2 Volumes). Heyamola Publishing. Istanbul, 2005.
  • (en) West, Stephanie. "‘The Most Marvellous of All Seas’: the Greek Encounter with the Euxine", Greece & Rome, Vol. 50, Issue 2 (2003), pp. 151–167.
  • (en) Pollution : [2].