Antoine Perrenot de Granvelle

prélat catholique

Antoine Perrenot de Granvelle [gʁɑ̃vɛl], né le à Besançon et mort le à Madrid, est un prélat bourguignon, évêque d'Arras puis archevêque de Malines et cardinal, un diplomate et un homme d'État au service de Charles Quint[2], puis de son fils, Philippe II[3].

Antoine Perrenot de Granvelle
Image illustrative de l’article Antoine Perrenot de Granvelle
Portrait du cardinal Granvelle par Titien.
Biographie
Naissance
Besançon (Ville libre impériale)
Ordre religieux Ordre de Saint-Benoît
Ordination sacerdotale
Décès (à 69 ans)
Madrid (Espagne)
Cardinal de l'Église catholique
Créé
cardinal
par le
pape Pie IV
Titre cardinalice Cardinal-prêtre de San Silvestro in Capite et de San Bartolomeo all’Isola
puis de Santa Prisca
puis de Santa Anastasia
puis de San Pietro in Vincoli puis de Santa Maria in Trastevere
puis Cardinal-évêque de Sabina
Évêque de l'Église catholique
Ordination épiscopale par Juan Pardo de Tavera
Archevêque de Besançon
Archevêque de Malines (duché de Brabant, Pays-Bas)
Évêque d'Arras (comté d'Artois, Pays-Bas)
Autres fonctions
Fonction laïque
Premier ministre des Pays-Bas espagnols
Vice-roi de Naples

Signature de Antoine Perrenot de Granvelle

Blason
«Durate» [1]
(en) Notice sur www.catholic-hierarchy.org

Membre du Conseil d'État des Pays-Bas, il est un des principaux conseillers de la Marguerite de Parme, gouvernante des Pays-Bas, de 1559 à 1564, puis vice-roi de Naples et président du conseil suprême d'Italie et de Castille.

Biographie

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Origines familiales et formation

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Il est le fils de Nicolas Perrenot de Granvelle (1486-1550), proche conseiller de l'empereur Charles Quint, puis garde des Sceaux du Saint-Empire romain germanique[4], et de Nicole Bonvalot, fille de Jacques Bonvalot, seigneur de Champagney, gouverneur de la ville de Besançon, chevalier de l'Éperon d'or, et de Marguerite Merceret.

Enfant, Antoine de Granvelle a comme précepteur le philologue Hugues Babet[5]. Il étudie ensuite le droit à l'université de Padoue, puis la théologie à l'université de Louvain.

Carrière dans l'Église (1529-1560)

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Chanoine et protonotaire apostolique de Besançon en 1529, alors qu'il n'a que 12 ans, il devient archidiacre de Gray en 1531, à l'âge de 14 ans, puis doyen d'Arbois, l'année suivante. Il est nommé en 1534 premier secrétaire de l'empereur et en 1535, prévôt d'Utrecht, abbé de Balerne en 1537 et coadjuteur du prieuré de Mouthier-Haute-Pierre en 1538 avant de devenir chanoine à Gand.

Au mois de , âgé seulement de vingt-trois ans, il est nommé évêque d’Arras grâce à une dispense. Il est fait chanoine de la cathédrale Notre-Dame-et-Saint-Lambert de Liège le . En qualité d'évêque d'Arras, il participe au Concile de Trente, où il s'exprime le [6].

Carrière politique sous Charles Quint (1547-1555)

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Grâce à l'influence de son père, il se vit confier plusieurs missions politiques, qui lui permirent de développer des compétences diplomatiques, tout en le familiarisant avec les grands courants de la politique européenne. Il prend part aux négociations de paix qui suivirent la défaite des princes protestants de la Ligue de Smalkalde (bataille de Muehlberg en 1547).

En 1550, il succéda à son père en tant que secrétaire d'État ; à ce poste, il conseilla Charles Quint au cours de la guerre contre Maurice de Saxe, il l'accompagna lors de la fuite d'Innsbruck, et il réussit à obtenir la paix de Passau ().

L'année suivante, il arrangea les détails du mariage de Marie Ie d'Angleterre et de Philippe II d'Espagne, à qui il offrit ses services en 1555, l'année de l'abdication de l'empereur.

Carrière sous Philippe II aux Pays-Bas (1556-1564)

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Conseiller de Philippe II (1557-1559)

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À la fin de la onzième guerre d'Italie, après la victoire de Saint-Quentin (1557), Philippe II fait de Granvelle un des émissaires chargés de négocier avec la France les traités du Cateau-Cambrésis, signés en avril 1559.

Principal conseiller de la gouvernante Marguerite de Parme

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Lorsque, quelques mois plus tard, Philippe quitte les Pays-Bas, où il ne reviendra jamais, Granvelle est nommé principal conseiller de la « gouvernante et régente » (gouverneur général) Marguerite de Parme, demi-sœur du roi, qui remplace Emmanuel-Philibert de Savoie. Granvelle est assisté par deux fidèles de Philippe II, Viglius van Aytta et Charles de Berlaymont, originaires, respectivement de Frise et du Hainaut.

Ils sont notamment chargés d'appliquer et de faire appliquer la politique religieuse de Philippe II, radicalement hostile au protestantisme. Ils vont de ce fait se heurter, dans le cadre du Conseil d'État à trois nobles de haut rang qui ont servi dans les armées de Charles puis de Philippe, mais qui, bien que catholiques, sont tolérants en matière religieuse : le prince Guillaume d'Orange et les comtes Lamoral d'Egmont et Philippe de Montmorency[7], comte de Hornes, qui tous trois veulent aussi préserver les libertés provinciales et urbaines, mises à mal par la politique de centralisation menée depuis les années 1520.

Cardinal et archevêque de Malines (1561)

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Une étape importante de cette centralisation est la réforme des diocèses, instituée par la bulle Super Universas (1559) : aux six diocèses traditionnels (suffragants de Cologne ou de Reims) sont substitués dix-huit diocèses correspondant plus ou moins aux dix-sept provinces, dont trois archidiocèses : Malines (siège primatial), Cambrai et Utrecht. Cette réforme, bien que favorable à l'idée d'un État spécifique, n'est pas très bien vue, parce qu'elle signifie un renforcement du contrôle de l'orthodoxie religieuse (chaque diocèse étant doté d'un tribunal d'inquisition).

Granvelle profite personnellement de cette réforme, puisqu'il devient archevêque de Malines le [8] ; vers la même époque[9], il est fait cardinal (avec le titre cardinalice de San Silvestro in Capite).

Les tensions politiques et la chute de Granvelle (1562-1564)

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Les années 1562-1563 sont marquées par l'aggravation des tensions au sein du Conseil d'État, où les trois nobles de l'opposition finissent par menacer de démissionner, ce qui amènerait certainement des troubles dans le pays. Ils bénéficient d'un certain soutien de la gouvernante qui se rend compte que la répression à outrance du protestantisme (comme en Espagne) n'est pas la meilleure solution aux Pays-Bas.

En , Philippe II fait une concession importante : Granvelle est révoqué de ses fonctions politiques aux Pays-Bas et doit se retirer dans son pays d'origine, le comté de Bourgogne. Il conserve malgré cela la fonction d'archevêque de Malines.

Carrière de 1564 à 1586

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Semi-retraite (1564-1570)

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Les six années qui suivent sont paisibles, marquées seulement par une visite personnelle qu'il fait à Rome en 1565.

Il impose à son frère Charles, abbé commendataire de l'abbaye Notre-Dame de Faverney (actuelle Haute-Saône), les décisions du concile de Trente visant à une amélioration du fonctionnement de l'Église catholique, l'obligeant à résider effectivement dans son abbaye et répondant négativement aux demandes qu'il lui adresse à Baudoncourt, les 29 et , pour résigner son titre abbatial au profit de leur neveu Antoine d'Achey[10].

Retour au service de Philippe II

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En 1570, Granvelle est chargé d'une mission diplomatique à Rome : négocier une alliance entre les États pontificaux, la république de Venise et la couronne d'Espagne contre l'Empire ottoman, alliance conclue le et dont le résultat est la victoire navale de Lépante (octobre 1571).

 
Tombeau à Malines.

La même année, il est nommé vice-roi de Naples, poste difficile et dangereux, qu'il occupe pendant cinq ans avec habileté.

Philippe II le rappelle en 1575 à Madrid, pour qu'il préside le conseil des affaires d'Italie.

En 1580, il conduit les négociations en vue de l'union des couronnes d'Espagne et de Portugal, et en 1584, celles du mariage de l'infante Catherine avec Charles-Emmanuel Ier de Savoie, un échec pour la France.

Ces succès lui valent d'être nommé archevêque de Besançon en novembre 1584. Mais, frappé de paralysie, il ne peut pas être intronisé.

Mort et inhumation

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Il meurt à Madrid le .

Son corps est transporté à Besançon et inhumé, comme celui de son père Nicolas Perrenot de Granvelle, dans le caveau de la chapelle familiale de l'église des Carmes, voisine du palais Granvelle.

Descendance

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Il laisse trois enfants naturels :

  • Catherine, épouse de Jean de Cools ;
  • Marie ;
  • Jean-Gilbert de Granvelle[11], devenu gentilhomme de la maison de l'archiduc Albert.

Le mécène et le collectionneur

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Granvelle fit construire après 1551 un palais à Bruxelles, le palais Granvelle, premier exemple de la Renaissance romaine dans les anciens Pays-Bas. On y perçoit notamment l'influence du palais Farnèse[12].

Granvelle avait une collection d'art célèbre, qui a en partie comporté les artistes préférés des Habsbourg, tels que Titien et Leone Leoni, mais aussi un certain nombre de travaux de Pieter Brueghel l'Ancien, ainsi qu'une collection significative héritée de son père.

L'ami de Brueghel, le sculpteur Jacques Jonghelinck (le frère du plus grand mécène de Brueghel) avait un studio au palais de Granvelle à Bruxelles.

Tandis qu'aux Pays Bas, il rencontra le peintre Antonio Moro et le présenta à la cour de Madrid, il sponsorisa également le sculpteur Giambologna et se chargea de sa première visite en Italie.

À sa mort, sa collection fut héritée par son neveu, sur qui Rodolphe II de Habsbourg, l'empereur autrichien très thésauriseur, fit pression pour lui vendre les plus belles pièces, ce qu'il fit en 1597 contre sa volonté, protestant que le prix offert pour trente-trois œuvres n'était pas assez même pour six, et moins que ce lui avait récemment proposé le cardinal Farnèse pour Le martyre des dix mille d'Albrecht Dürer. Les négociations furent menées par Hans von Aachen.

 
Le Nain du cardinal de Granvelle et son molosse. Portrait par Antonio Moro (musée du Louvre, vers 1560).

La plupart de ces tableaux sont maintenant à Vienne ou à Madrid, y compris la Vénus avec un organe-joueur d'orgue de Titien, la copie de la statue équestre de Marc Aurèle de Giambologna, des tapisseries de Jérôme Bosch et un buste de Charles Quint par Leoni[13]. Le tableau de Bronzino, Déploration sur le Christ mort, offert par Cosme de Médicis à Granvelle, exposé jusqu'à la Révolution dans la chapelle funéraire des Granvelle aux Carmes de Besançon, est, depuis son ouverture, au musée des Beaux-Arts de Besançon[14].

Bien que Granvelle ait été peint par Titien, par Willem Key, ou par Antonio Moro, il y a plus célèbre que n'importe quel portrait de Granvelle lui-même : le portrait de son nain et de son mastiff par Antonio Moro, qui a peut-être lancé la tradition espagnole des portraits des nains de cour.

Granvelle eut pour secrétaire, pour un temps à Rome, l'humaniste flamand Juste Lipse. Il a également correspondu avec les compositeurs Roland de Lassus et Adrien Willaert[15].

Il avait une bibliothèque magnifique, dont certains ouvrages sont encore à Besançon, ainsi que ses papiers d'État. Protecteur de l'imprimeur français d'Anvers Christophe Plantin, il lui assura le monopole de la publication des ouvrages de piété pour l'Espagne. Il lui fit aussi publier des ouvrages d'érudition, en particulier des éditions d'auteurs antiques menées à bien par son protégé romain Fulvio Orsini. Grâce à lui, Plantin publia des textes rares et des editiones principes.

Iconographie

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Antoine Perrenot de Granvelle par Willem Key.
  • 1548 - par Le Titien, HsT; Dim; H: 113,3 cm x L: 88,27 cm (Kansas city, Nelson Atkins Museum)[16]
  • 1549 - par Antonio Moro, portrait à mi-corps ; Huile sur toile (Vienne, Kunsthistorishes Museum)
  • 1561 - par Willem Key (114 x 88 cm ; Weimar, Schlossmuseum)
  • 1576 - portraits par Scipione Pulzone dit Gaetano, huiles sur cuivre, Londres Courtauld Gallery - 81,7 x 61,6 cm et Besançon Musée du Temps - 73 x 56 cm 
  • 1650-1700 vers - par Nicolas III de Larmessin, gravure au burin d'après Lambert Suavius (musée de Dole)
  • s. d. - Spaensche tirannye in Nederlandt, gravure du soulèvement des Pays-Bas contre la tyrannie espagnole avec dans le médaillon en haut à droite le portrait du Cardinal de Granvelle.
  • 1834 - Le Cardinal de Granvelle par Ernest Meissonnier, HsT; Dim; H:32 cm x L: 26 cm, commande de Louis-Philippe pour le (musée du château de Versailles)
  • 1835 - Le Cardinal de Granvelle, autre HsT par Albert Gregorius; HsT; Dim; H:69 cm x L: 55 cm pour le musée du château de Versailles)
  • 1897 - par Jean Petit, statue en marbre blanc érigée par une donation du bibliothécaire de la ville de Besançon : Charles Weiss. Mise en place en 1898 à Besançon dans la cour du Palais Granvelle, puis déplacée en 1952 à Ornans, rue Édouard Bastide.
  • XXe siècle vitrail en Belgique

Notes et références

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  1. D'après Virgile dans l'Énéide : durate et vosmet rebus servate secundis
  2. Charles Quint (1500-1558) est souverain des Pays-Bas (duc de Brabant, comte de Flandre, comte de Hollande, etc.) en 1515, en tant que descendant de Charles le Téméraire ; roi de Castille et roi d'Aragon en 1516 en tant que descendant des Rois Catholiques ; chef de la maison de Habsbourg en 1519, en tant que descendant de Maximilien d'Autriche, et élu empereur en 1519 sous le nom retenu par l'histoire : Charles V (Carolus Quintus, Charles Quint).
  3. Philippe reçoit les Pays-Bas en octobre 1555, puis les couronnes d'Espagne en janvier 1556 sous le nom de Philippe II. En revanche, c'est le frère de Charles, Ferdinand, qui devient chef de la maison de Habsbourg et qui est élu empereur.
  4. Dont font partie les Pays-Bas et le comté de Bourgogne, réunis dans le cercle impérial de Bourgogne.
  5. Daniel Antony, Nicole Bonvalot, dame de Granvelle: Une femme d'exception de la Renaissance, Les Editions du Sekoya, (ISBN 978-2-84751-015-7, lire en ligne)
  6. Daniel Antony, Nicole Bonvalot, Dame de Granvelle, éditions du Sekoya, 2003, 338 pages, p. 83
  7. Il s'agit d'une branche néerlandaise de la famille de Montmorency.
  8. Le Supplément au Nobiliaire des Pays-Bas et du comté de Bourgogne, (1555-1614), Malines, 1779, donne p. 11 la date du 28 mai 1560.
  9. Le Supplément au Nobiliaire des Pays-Bas et du comté de Bourgogne donne p. 11 la date du 26 février 1561 par Pie IV
  10. Bullet, Manuscrit ; Dom Grappin, Mémoires ; Dom Bebin, Manuscrit
  11. Revue historique, 1876 (1)
  12. Krista de Jonge, Le palais Granvelle Bruxelles : premier exemple de la Renaissance romaine dans les anciens Pays-Bas, 2000, lire en ligne
  13. (en) Hugh Trevor-Roper, Princes and Artists, Patronage and Ideology at Four Habsburg Courts 1517-1633, Thames & Hudson, Londres, 1976, p. 112
  14. [1]
  15. (en) Trusted archives for scholarship
  16. Antoine Perrenot de Granvelle, 1548, par Titien

Voir aussi

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Sources et bibliographie

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Articles connexes

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Liens externes

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Sur le site Mémoire vive patrimoine numérisé de Besançon :