Royaumes francs
Les royaumes francs sont les différents royaumes barbares qui se sont succédé ou ont cohabité sur le territoire de l'actuelle France, de l'actuelle Belgique, des Pays-Bas et d'une partie de l'actuelle Allemagne après la disparition de l'empire romain d'Occident, et la conquête de ces territoires par un peuple – les Francs – au cours du Ve siècle. Ces royaumes, réunis au sein du Royaume des Francs (Regnum Francorum en latin), perdureront pendant tout le Haut Moyen Âge, du Ve au IXe siècle[1].
Les royaumes des Francs
Les Francs étaient à l'époque romaine l'un des nombreux peuples germaniques installés sur la rive droite du Rhin, à l'extérieur des frontières de l'Empire. Au IIIe siècle, ils avaient participé à la grande invasion de 256-257, aux côtés d'autres peuples germaniques qui entrèrent dans l'Empire romain pour piller. Ils prirent part à de nombreux autres raids ultérieurement.
Tout d'abord installés entre Rhin et Ardennes en tant que Lètes, les Saliens s'étendent petit à petit sur le territoire de l'ancienne Gaule. En 376[réf. nécessaire], les Francs ripuaires (de la rive droite) passèrent le Rhin dans la région de Cologne, où ils s'installèrent pour former le royaume de Cologne[2].
En 406, les Francs sont en première ligne pour défendre le Rhin contre l'invasion des Vandales. Un demi siècle plus tard, ils sont alliés du général romain Aetius contre les Huns lors de la bataille des champs Catalauniques, près de Troyes[3].
L'extension prise par leurs royaumes en Gaule belgique est visible en 450 sur la carte de l'empire hunnique. Un des rois saliens, Childéric, est un général romain cantonné et peut être gouverneur de la province de Belgique seconde. D'autres rois y sont aussi implantés (comme à Cambrai). D'autres royaumes francs existent sur le Rhin, autour de Cologne notamment : ce sont les Francs dits rhénans ou ripuaires.
La période des royaumes francs, au pluriel, correspond à celle de la dynastie mérovingienne, qui a régné sur ces territoires à partir de Clovis Ier, premier roi des Francs, de 481 à 511. Il unifie ces royaumes en exécutant ses parents régnant à d'autres endroits de Belgique seconde en 486 : Ragnacaire (Cambrai) et ses frères Richaire et Rigomer, le roi Cararic, et de même en Germanie[réf. nécessaire].
Les royaumes mérovingiens
L'Austrasie
Durant la période mérovingienne, l'Austrasie, nommé ainsi selon une mauvaise orthographe des clercs (du latin australis, méridional en français), son vrai nom étant Oster-rike en vieux francique (royaume de l'Est)[4], est l'un des royaumes francs apparus à la mort de Clovis (511), lorsque le territoire de celui-ci fut partagé entre ses fils. Elle couvrait le nord-est de la France actuelle et la Rhénanie, les bassins de la Meuse et de la Moselle, jusqu'aux bassins moyen et inférieur du Rhin. La capitale en fut d'abord Reims, puis Metz[1]. Les habitants de l'Austrasie étaient les Austrasiens.
C'est Thierry, (latin Theudoricus), fils aîné de Clovis Ier et d'une franque rhénane, qui hérita de l'Austrasie, qu'il gouverna jusqu'à sa mort en 534. Thierry, en tant qu'aîné, fut largement avantagé, et reçut la moitié du royaume, ses trois autres frères se partageant l'autre moitié.
Thierry reçut :
- le royaume de Metz, qui comprenait également Reims : c'était le pays des Francs ripuaires, c'est-à-dire l'ancien royaume de Cologne, car par sa mère il est apparenté aux anciens souverains Francs ripuaires. Il contrôle ainsi la rive droite du Rhin et les Alamans.
- la vallée de la Moselle ;
- les territoires qui composeront la future Champagne ;
- l'Auvergne, qu'il avait conquise pour son père en 507.
En 523/524, à l'occasion d'une expédition contre les Burgondes menée par les quatre frères, à l'instigation de la reine Clotilde, Thierry va étendre le territoire de l'Austrasie. Après la mort de son frère Clodomir à la bataille de Vézeronce (524), Thierry capte son héritage constitué de l'Auxerrois, du Berry et du Sénonais.
En 526, il pille l'Auvergne qui s'était révoltée.
En 531, il ajoute la Thuringe, un territoire situé au centre de l'actuelle Allemagne, au nord de la Bavière, à son royaume[1].
À sa mort, en 534, il laisse le royaume à son fils Théodebert Ier. À partir de cette date, vingt-deux rois vont se succéder sur le trône d'Austrasie, jusqu'à Childéric III, le dernier roi franc de la dynastie des Mérovingiens, qui régna de 743 à 751, après avoir été installé sur le trône par Pépin le Bref, après l'interrègne de six ans qui suivit la mort de Thierry IV.
Au cours de ces deux siècles, l'Austrasie a connu une histoire mouvementée, des conflits avec la Neustrie, des mouvements de territoire au gré des guerres et des successions, des périodes de prospérité, comme le règne de Dagobert Ier, qui régna d'abord sur la seule Austrasie de 623 à 629, avant de devenir roi des Francs de 629 à 639, après avoir réussi à unifier l'ensemble des royaumes francs. Le pouvoir passa progressivement aux maires du palais, qui finirent par chasser la dynastie fondée par Clovis, pour en installer une nouvelle, la dynastie carolingienne.
Berceau de la dynastie carolingienne, l'Austrasie disparaît avec le dernier roi mérovingien (751), pour être intégrée dans le grand royaume franc que réunirent Pépin le Bref et Charlemagne[3].
La Neustrie
La Neustrie est le nom d'un royaume franc qui couvrait le nord-ouest du royaume des Francs, approximativement entre Loire (frontière avec l'Aquitaine) et Escaut, incluant l'Armorique, avec une frontière à l'est floue, dans l'actuelle Champagne : Reims est ainsi généralement en Austrasie, et la Bourgogne fut souvent détachée en royaume autonome. L'Aquitaine fit parfois partie de la Neustrie.
Le terme apparaît au VII ème siècle, utilisé par le moine Jonas de Bobbio, pour désigner le royaume de l'ouest lors des partages entre rois mérovingiens. Karl Ferdinand Werner, historien allemand, présente la distinction Neustrie / Austrasie comme héritière de la distinction francs saliens / francs rhénans. La capitale a souvent été Soissons, mais les nombreux palais royaux existant alors rendent cette notion assez floue. Rouen a aussi tenu ce rôle.
La première forme de la Neustrie, bien que le terme ne soit connu par les sources qu'un siècle après, est le royaume de Clotaire Ier, créé lors du partage qui suivit la mort de Clovis Ier. L'emploi du terme est donc alors anachronique. Ce royaume, au fil des successions, se fond dans le royaume des Francs réunifié par Clotaire Ier.
À la mort de Clotaire Ier, en 561, le royaume est à nouveau partagé — par tirage au sort — entre ses quatre fils (Caribert Ier, Gontran, Sigebert Ier et Chilpéric Ier). C'est ce dernier qui hérite de la Neustrie et y inclut l'Aquitaine à la mort de Caribert.
Âgé seulement de quelques mois, Clotaire II, fils de Chilpéric Ier, hérite de la Neustrie à la mort de son père en 584. À la mort de Thierry II de Bourgogne, en 613, Clotaire II récupère l'Austrasie et devient ainsi seul roi des Francs. À sa mort, le roi de Neustrie est son fils Dagobert Ier (629-639), puis Clovis II son fils, puis Clotaire III son fils. C'est l'époque d'une certaine prépondérance des Neustriens dans le royaume franc. La Neustrie a ses propres maires du palais. Ebroïn est le plus célèbre.
Après la mort de Clotaire III en 674, la Neustrie se voit imposer un roi — Thierry III — par les Austrasiens, l'Aquitaine ayant retrouvé auparavant son indépendance.
Berchaire, maire du palais du roi Thierry III est vaincu en 687 à la bataille de Tertry, petit village de Picardie proche de Péronne, par Pépin de Herstal, maire du palais d'Austrasie. Cette défaite ruine définitivement les prétentions hégémoniques de la Neustrie, qui n’est à partir de ce moment qu'un État vassal de l'Austrasie que dirigent les Arnulfiens. Cependant la distinction entre Neustrie, Austrasie, Aquitaine et Bourgogne va subsister encore, bien que s'effaçant progressivement. On la retrouve parfois dans les partages carolingiens. Lors du traité de Verdun en 843, le nom de Neustrie ne désigne plus que la partie ouest du royaume entre la Loire, la Meuse et la Manche (le royaume de Bretagne ayant acquis à cette époque son indépendance). Les Robertiens fondent leur puissance sur le contrôle de nombreux honneurs (honores) neustriens, plusieurs étant marquis de Neustrie. Le terme disparaît après le traité de Saint-Clair-sur-Epte en 911, où une partie de son territoire est cédée au viking Rollon.Événement à l'origine de la Northmannie ou Normandie. La constitution des principautés d'Anjou, de Blois, du Maine et de Flandre vident également le mot de son sens, et il n'apparait plus.
Le royaume de Bourgogne
Le royaume d'Aquitaine
En 620, les Vascons s'établissent dans la partie méridionale de l'Aquitaine, prenant alors le nom de Gascogne[5]. En 629, les deux fils du roi Clotaire II succédent à leur défunt père. Caribert, fils de Sichilde, ayant été écarté du pouvoir pour cause de handicap par Clotaire II. Son demi-frère, Dagobert, fils de Bertrude est donc reconnu par les grands comme roi de Neustrie et de Burgondie. Mais Brodulf, frère de Sichilde et oncle de Caribert, avec l'appui de partisans neustriens, pousse Caribert à revendiquer sa part de l'héritage paternel. Il obtient donc de Dagobert Ier, conformément à la règle de succession de la loi salique prévoyant le partage du regnum francorum entre les différents princes, un territoire allant de la Saintonge aux Pyrénées[6] et ayant Toulouse pour capitale, comprenant les villes de Cahors, Agen, Périgueux et Saintes[7]. Ce royaume ou teilreich ne fut concédé à Caribert II qu'à la condition qu'il soit soumis à l'autorité de Dagobert Ier. Ce territoire avait été choisi pour servir de zone tampon entre la Septimanie wisigothique, les Basques et le royaume franc de Dagobert Ier[6]. En 632, Caribert II meurt et Chilpéric, son jeune fils, quelques temps après. Dagobert Ier rattache le royaume d'Aquitaine au regnum francorum[8]. À la fin du VIIe siècle, l'Aquitaine devient indépendante, sans pour autant former un royaume. Charles Martel puis Pépin le Bref la soumettent à nouveau. Elle réapparait come royaume dans les partages des fils de Louis le Pieux, avant d'être intégrée à la part de Charles II le Chauve.
Le royaume des Francs
Ce Regnum a souvent été divisé en sous-royaumes (appelés « parts de royaume[9] » ou Teilreiche[10]) suivant la coutume franque de partage du royaume entre les fils du souverain, tandis que les périodes pendant lesquelles il a été réuni ont plutôt été exceptionnelles. Cependant l'unité de ces différents sous-royaumes qui résultaient de ces partages a toujours été reconnue, malgré leurs affrontements violents. Ainsi, Paris, la capitale symbolique du Regnum Francorum, a longtemps été exclue des partages. De plus, ces royaumes ont toujours su faire taire leurs conflits internes pour s'unir contre les agressions étrangères.
Avec l'arrivée au pouvoir des Carolingiens, à partir de Charlemagne (768), on ne parlera plus de royaumes francs, mais seulement du royaume des Francs (Regnum Francorum) - la nuance grammaticale est d'importance - même s'il y eut encore quelques partages fratricides. L'Empire de Charlemagne comprend le royaume des Francs, le royaume des Lombards ou d'Italie, la Saxe, la Bavière, ... Les nouveaux partages de Verdun et notamment Meersen créent les « Francies » : Francie occidentale, Francie orientale et Francie médiane, incluant les conquêtes de Charlemagne. Finalement, seule la Francie occidentale garde ce nom et devient peu à peu le royaume de France (Regnum Franciae), terme généralisé vers 1204. Celui-ci est alors constitué des principautés territoriales féodales (laïques et écclésiastiques) et du domaine royal.
Le Regnum Francorum est réunifié pour la dernière fois brièvement sous Charles III le Gros (885-887). Le terme va alors peu à peu cesser de désigner l'ensemble, pour ne plus désigner que la Francie occidentale qui deviendra le royaume de France.
Les rois de France s'intitulent jusque vers 1190-1210, dans leur titulature en latin, Rex Francorum.
Périodes d'unité du Regnum Francorum
Mérovingiens
- de 481 à 511 : Clovis Ier
- de 558 à 561 : Clotaire Ier
- de 613 à 629 : Clotaire II
- de 632 à 639 : Dagobert Ier
- de 673 à 675 : Childéric II
- de 687 à 691 : Thierry III
- de 691 à 695 : Clovis IV
- de 695 à 711 : Childebert IV
- de 711 à 715 : Dagobert III
- de 719 à 721 : Chilpéric II
- de 721 à 737 : Thierry IV
- de 743 à 751 : Childéric III
Carolingiens
- de 751 à 768 : Pépin le Bref
- de 771 à 814 : Charlemagne
- de 814 à 840 : Louis le Pieux
- de 840 à 877 : Charles le Chauve (roi de Francia occidentalis empereur d'occident depuis le 25 décembre 875
- de 885 à 887 : Charles III le Gros (roi de Francie orientale et régent de Francie occidentale)
Le royaume d'Aquitaine
La Lotharingie
Notes et références
- (fr)« Cartes sur les royaumes mérovingiens », sur www.castlemaniac.com (consulté le )
- (fr)« les Francs », sur his.nicolas.free.fr (consulté le )
- (fr)« Le royaume des francs », sur /www.cliohist.net (consulté le )
- Ivan Gobry, Clotaire II, collection « Histoire des rois de France », éditions Pygmalion, p. 14.
- Paul Vidal de La Blache, Atlas général d'histoire et de géographie, librairie Armand Colin, 1894, p. 21.
- Patrick Périn et Gaston Duchet-Suchaux, Clovis et les mérovingiens. Collection Historia, éditions Tallandier, p. 118.
- Laurent Theis, Dagobert, un roi pour un peuple, éditions Complexe, 1982, p. 12.
- Ibid., p. 14.
- Stéphane Lebecq, Les origines franques, Ve-IXe siècle, éditions du Seuil, p. 63.
- Eugen Ewig, Die fränkischen Teilungen und Teilreiche (511-613), in Spätantikes und frankisches Gallien, Munich, 1976.
Voir aussi
Bibliographie
- Grégoire de Tours, Histoire des Francs
Articles connexes
- Histoire de la Rome antique
- Histoire de France
- Empire carolingien, puis Royaume de France :
- France – Formes de gouvernement successives depuis le Haut Moyen Âge
- Royaume franc | Roi des Francs | La royauté mérovingienne
- Royaume de France | Roi de France – reines de France
- Républiques françaises : I II III IV V | Présidents de la République
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